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Jeudi 1er janvier 2009

 

 

JE VOUS SOUHAITE UNE BONNE ANNÉE 2009

PLEINE DE SOURIRES, D'ÉMOTION ET DE RESPECT

PLEINE DE DÉCOUVERTES, D'ÉCOUTE ET DE CURIOSITÉ,

PLEINE D'ATTENTIONS DONNÉES ET REÇUES 

DE BONHEUR AUTOUR DE VOUS

 ET EN VOUS... 

 

BREF UNE ANNÉE PLEINE DE MUSIQUE ET D'HARMONIE !

PHILIPPE B. TRISTAN 

 

 

 

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Dimanche 11 janvier 2009, Besançon

 

 

Lorsqu'une nouvelle année commence, je sais que la semaine suivante il me faudra accepter un nouveau chiffre pour me définir lorsqu'on me posera la question : "Vous avez quel âge?" Que les chiffres tournent, ce n'est pas trop la question, on reste toujours dans des unités largement maîtrisables : rare sont ceux qui se sont vus attribuer un chiffre à trois unités. Ce qui est gênant dans cette affaire, c'est la catégorisation. Vous voyez : tel chiffre, telle catégorie. Chacun plus ou moins consciemment se laissant aller à des rapprochement catégoriels et laissant échapper des "Houla !". On ne devrait pas dire : "Vous avez quel âge" Mais, comme les anglais, "vous êtes quel âge". Ce serait plus franc comme question.

 

Voilà pourquoi j'ai tenu à organiser une petite fête symbolique en l'honneur de mes 40... pardon, de mes 49 ans (je me suis trompé de chiffre sur le clavier justement parce que le 9 et le 0 s'y trouvent voisins) Justement  parce que ce chiffre sera le dernier de la catégorie "quarantaine". J'ai donc invité plein d'amis et je me suis amusé à inviter des amis, d'abord, de catégories sociales très diverses. Bien sûr il y a eu beaucoup d'artistes, mes amis musiciens, des plasticiens aussi. Mais il y a eu aussi deux médecins, une certain nombre de RMIstes sans emplois et certaines catégories intermédiaires, de l'ouvrier au commerçant. Tels sont mes amis. Enfin, vers minuit, j'ai eu aussi le grand plaisir de voir arriver Théo et une petite bande d'amis(ies), qui, s'ils se sont installés légitimement dans la chambre de mon fils, se sont néanmoins retrouvés dans une chambre qui faisait office d'antichambre entre les deux lieux de la fête, la cuisine et le salon. Du coup les invités passant d'une pièce à l'autre échangeaient quelques propos à la bandes des ados et on a entendu retentir quelques fous rires rafraîchissants. Bref, une soirée qui s'est très bien passée, dans une bonne humeur sans barrières, ni sociales, ni raciales, ni générationnelles. Ce qui fait que ce chiffre proche d'un demi siècle m'est apparu comme quelque chose de plutôt sympathique et de rassurant, tant au niveau des catégorisations qu'au niveau des alertes que la presse n'arrête pas de nous ressasser. Quand on regarde la France de près, eh bien il y a plein d'éléments qui témoignent qu'il suffit de choisir les bons axes de vision pour cesser de faire flipper les gens continuellement !

 

A ce propos je retiens des actualités un élément très enthousiasmant : l'année 2008 a battu tous les records en matière de pratiques culturelles : cinémas, livres, musées, spectacle vivant. Décidément cette crise économique a des effets extrêmement positifs. D'une part elle va forcer le monde de la finance à aller vers un mode de fonctionnement un peu moins délirant, d'autre part elle a incité les gens à cesser de vivre à travers l'ivresse de la consommation aveugle et de revenir à des dépenses plus bénéfiques pour l'équilibre de leurs consciences. Ce qui conforte mes thèses selon laquelle l'art, la création et la culture font bien partie du développement durable et de l'économie solidaire (à ce propos voir Oui l'Art appartient à l'économie solidaire !, une page publiée en 2006).

 

Je serais tenté de parler de l'invasion israélienne dans la bande de Gaza, je serais aussi tenté d'aborder les problèmes posés actuellement par la cessation brutale de son approvisionnement de gaz par la Russie (alors que mes amis russes me proposent de préparer un projet pour l'année 2010 : "année de la Russie en France et de la France en Russie). Mais pour l'instant, je préfère écouter ce que la presse en dit car il serait idiot de se précipiter imprudemment sur des sujets qui seront probablement à l'origine de bien des maux du futur... Une réflexion préalable s'impose avant de dire n'importe quoi.

 

Et puis, je termine par laisser la parole à Jeanne Moreau qui nous lit un texte élémentaire pour ne pas laisser la France tourner le dos à une de ses plus belles qualités : l'hospitalité.

 

 

 

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Samedi 24 janvier 2009 

 

 

Passée la soirée avec la famille Gaguenetti. J'ai connu cette famille de musiciens manouche à l'occasion du colloque "Roms d'Europe" pour laquelle j'étais chargé de la captation vidéo. Puis je suis allé les voir dans le terrain qu'ils habitent vers Dole pour les filmer à nouveau, et cette fois c'était dans le cadre du site Internet "Migrations à Besançon". Je devais en effet réaliser un film portrait de quelques minutes. Et là, chez eux, nous avons pu mieux nous connaître. Sentant que je leur voulais beaucoup plus de bien que de mal ils m'ont en quelque sorte adopté. Nous avions prévu de nous revoir lorsque le film serait terminé. Et ils ont décidé de m'inviter à l'occasion d'un anniversaire qu'ils fêtaient ce soir.

 

En partant pour Dole je me sentais nerveux. L'organisation de notre résidence qui doit avoir lieu en février m'avait un peu ébranlé les nerfs, car s'il n'y a pas eu grand problème avec l'équipe française, en revanche ce fut plus compliqué avec l'équipe tchèque, Ludmila et Karel n'ayant pas leurs vacances en même temps et j'en passe... 

Et puis il pleuvait, - un jour triste d'hiver...

 

Le terrain où habitent les musiciens-ferrailleurs se trouve dans les environs proche de Dole. Le film donne une idée de la façon dont la famille s'est installée sur ce terrain, entre nomadisme (caravanes) et sédentarisation (premières constructions). Le film sera prochainement diffusé sur le site "Migrations à Besançon".

 

La famille est constituée du grand père 

(sa femme, décédée ils y a quelques années était une Reinhardt, une petite cousine de Django), de ses six enfants (trois garçons, deux filles) et de ses petits enfants. Ensemble ils forment un groupe de jazz manouche : "Swing 39".

 

Quand je suis arrivé, vers 18h30, la fête était commencée. Tout le monde se trouvait dans ce qu'ils appellent le bar et qui est l'ancienne remise de la maison qui a été incendiée quelques jours après la signature du compromis de vente. Par qui? Apparemment des voisins qui ne désiraient pas leur voisinage. La maison n'a pas pu être remise en état faute de moyens mais la remise, composée de deux pièces, a pu être coiffée d'un toit et emménagée en lieu de convivialité pour la famille et ses amis.

 

J'ai appris pendant la soirée qu'ils organisent presque un anniversaire par mois, le 6 du mois, quand les sous sont arrivés. Aujourd'hui c'était l'anniversaire du seul fils qui n'est pas musicien, Christophe, dit Tomo. Il m'a dit avoir décidé, petit, qu'il ne poursuivrait pas la vocation de la famille. Il s'agit d'un bel homme, fier et confiant, et qui fêtait ses... 35? 39 ? Mince je ne m'en souviens plus...

 

Toute la famille était là, des petits enfants au grand père. Les invités se trouvaient dans la partie bar, première pièce en entrant. Dans la deuxième salle il y avait un énorme poêle à bois cylindrique, une sono apportée par l'aîné des fils qui travaille dans une boite de sonorisation

et une grande table entourée de chaises et de bancs. La décoration était sommaire mais accueillante et la musique était bien sûre manouche !

 

Nous sommes vite passés à table mais seulement les hommes. Il n'y avait d'ailleurs pas de place pour tout le monde, mais il s'agirait d'une tradition manouche que les hommes mangent avant et à part des femmes. 

          

Dehors, Gérôme et sa femme faisaient cuire merguez et morceaux de porc et de lapin sur un vaste barbecue fait maison. 

Gérôme c'est le soliste du groupe. Je lui ai demandé un peu plus tard comment il avait été décidé que ce serait lui le soliste. Il m'a répondu qu'il ne s'en souvenait plus car il avait huit ans quand la décision s'est prise !

 

Nous avons mangé les grillades accompagnées de salades : macédoine, tomates, carottes râpées. Pas de cérémonie particulière : on commence à manger quand les plats ont été posés sur la table. Puis on s'est trouvé debout je ne sais plus comment et les femmes et les enfants en ont profité pour dresser une table propre et se mettre à manger à leur tour. 

 

Étaient présents aussi une famille de la zup d'origine chaouia et deux autres gadje (le troisième c'était moi).

 

On s'est retrouvé au coin du bar à boire des Whisky coca et à parler de choses et d'autres. Il se trouve qu'Ali, apparemment le chef de la famille Chaouia, s'est mis à me faire une mini conférence sur la différence entre les Judaïstes et les  Sionistes : "Avec les juifs, les Judaïstes, on vit depuis des siècles sans problème, la racaille ce sont les Sionistes. En une semaine ils ont tué 1500 personnes à Gaza, ça dépasse en moyenne par jour ce qu'ont fait les nazis" Je ne connaissais pas assez le sujet pour le contredire, mais il m'a semblé que l'argument était excessif. Évidemment il vaut mieux éviter de discuter sur ces sujets pour l'instant, c'est encore trop à chaud. Mais il est évident qu'il faudrait trouver à ce conflit une solution car cela envenime les relations entre les peuples musulmans et, finalement, tous les peuples qui ne le sont pas. Israël, c'est en quelque sorte la porte, ou encore le miroir, de l'occident.

 

Et puis père et fils se sont mis à jouer des morceaux de Django. On a entendu "Nuage" bien évidemment et c'était superbe car ils ont une telle connaissance les uns des autres que les morceaux ont une cohérence rythmique étonnante et puissante. Le trio a été bientôt rejoint par la fille aînée qui s'est mise à chanter "Django, Django, tous les gens du voyage...." et d'autres chansons qui réjouissaient les grands et les petits.

  

Les enfants fredonnaient les chansons en même temps que leur mère ou leur tante, les buveurs de la pièce du bar s'étaient rapprochés et applaudissaient généreusement. Il faut dire que c'était largement mérité, le son était bon, bien amplifié et les musiciens plus que convaincants tandis que, pour les enfants, c'est tout un patrimoine familial qui était en train de se transmettre...

 

Quelques vapeurs d'alcool, une grande gentillesse et un respect marqué partout. Les enfants étaient nombreux mais semblaient trouver leur place parmi ce monde d'adultes sans marquer une nervosité qui aurait pu être gênante... On se trouvait bien. La température montait progressivement car pour un poêle, c'était un poêle ! Et régnait souverainement un esprit puissant et protecteur que rien ne semble pouvoir rompre : cette confiance familiale, issue de principes profondément intégrés et enracinés, et qu'on imagine avoir permis à ces gens et à leurs ancêtres de traverser les infortunes sans chuter ni se briser... 

 

Vers dix heures vint le moment de remettre les cadeaux. On fit une sorte de file d'attente et chacun son tour va remettre son cadeau et embrasser, quatre fois, le fils, l'oncle ou le frère. Un rituel de plus dans les pratiques familiales. Et vraiment, lorsqu'un enfant venait apporter un paquet de cigarettes à son oncle, c'était trop charmant !

 

 

Une belle soirée, en fait comme un voyage. Et pourtant ce n'était qu'à quelques kilomètres. Je suis rentré calme et la bonne humeur retrouvée. Trop tôt néanmoins car mon poste de veilleur m'attendait... Dommage.

 

 

 

 

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Vendredi 13 février 2009 

 

Cette semaine le groupe PB. TRISTAN était en résidence au petit théâtre de la bouloie. Mazette ! Enfin avoir le temps de travailler; et dans de bonnes conditions. La motivation était générale, il y avait Alexis, Guigui, Titi, Karel, Pierre (Signoret) qui réalisera nos lumières et Philippe (Avocat) qui s'occupera du son, quand il le pourra bien sûr. Nous restons aussi fidèle à Stéphane (Cretin) mais, avec Jane Birkin, sa disponibilité est moindre.

 

Il manquait malheureusement Ludmila, qui est en vacances seulement en cette fin de semaine et le théâtre n'était pas libre la semaine prochaine....

 

Nous avons donc commencé à mettre au point les projections vidéos que nous envisageons pour l'avenir, et à commencer par Lagnieu, notre concert du 8 mars. Photos, films d'entretiens, l'image s'ajoute ou se fond dans la musique, ouvrant son champ d'imaginaire. Tout cela dans le désir de créer un univers spécifique. Une chanson-univers, c'est à cela que j'aspire.

 

Et puis nous avons analysé et travaillé notre aspect scénique. On nous a fait souvent remarquer l'aspect statique de nos concerts. Il fallait prendre le temps de creuser ça. Mais pour ce faire il faut bien sûr se trouver sur un grand plateau. Avec ses 40 m², celui du théâtre de la Bouloie était propice au travail.

Ce travail scénique passait aussi par un constat : j'ai trop souvent la guitare en main et elle me cloue au micro : pas moyen de bouger. Nous avons donc trouvé trois morceaux où je vais pouvoir n'avoir en main que mon micro. Quel bonheur ! Quelle liberté ! Et finalement la musique y trouve une cohérence car quand Karel n'avait rien à faire dans un morceau, on se demandait vraiment pourquoi je jouais de la guitare !

 

Patrick Barbenoire est venu nous apporter son regard. J'aime bien comment Patrick prend les choses. Avec un grand sérieux, une attention scrupuleuse. De plus ses quelques années avec le Cirque Plume lui a appris à travailler efficacement. Ses remarques ont été écoutées avec une grande attention.

 

Enfin, Christian Pecorini est venu nous rejoindre pour assurer les percussions. Certaines chansons y ont trouvé une dynamique fantastique, oui, nous étions contents. Guigui a travaillé avec une concentration et une ponctualité remarquable, toujours prêt à m'encourager, ce qui, vu ma nature flippée, est bien utile. Titi a fait quelques caprices mais il a été délicieux la majorité du temps. On commence tous à se connaître tellement, c'est une vraie équipe, une belle équipe. Alexis développe des talents de scène insoupçonnés, la sensibilité de son jeu est de plus en plus étonnante, pareil pour Guigui. Titi connaît le répertoire dans ses moindre recoins et Karel, après la crise de cet été, reprend sa place avec confiance et bien être. Il m'a quand même dit : "Je suis sûr que tu as la meilleure équipe de musiciens de Besançon" ! C'était agréable à écouter après les critiques un peu mesquines que Ludmila avait entendues de lui au début de la tournée tchèque. Chacun a le droit à sa crise, ça a un peu pété il y a un mois et le ciel s'est maintenant dégagé !

 

Résultat, les morceaux ont vraiment monté d'un cran, - ça joue !

 

Repas chez moi en fin de résidence. J'avais invité une amie d'origine tchèque pour ne pas que Karel se sente trop déconnecté. Il faut s'imaginer que, lorsqu'on parle Français, il ne comprend rien ! A la fin du repas, après quelques verres et utilisant la commodité d'une interprète, ils se sont tous mis à se faire des déclarations d'estime et d'amitié et c'était trop beau à entendre. J'aime tellement la paix !

 

Lorsque se terminera le travail sur les films qui m'occupe depuis le mois d'octobre, il va falloir que je me remette sérieusement dans les contacts pour de nouveaux concerts. Il est difficile de se concentrer sur trop de sujets. En mars il y aura un film à terminer, les trois concerts des 6- 7- 8, la projection de "Migrants et Immigrés du Continent" à Besançon dans le cadre de la semaine contre le racisme, une exposition à Ceske Budejovice dans le cadre de la semaine culturelle française... Bref guère le temps de souffler...

 

A l'heure où j'écris, Ludmila est en route vers la France et Karel est en route pour la tchéquie. Leurs bus se croiseront dans la nuit... Quel dommage que Ludmila n'ait pu être là pour ce travail ! Il faudrait une deuxième résidence.... Pas si simple !

 

 

 

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Mardi 24 février 2009  

 

 

Les pages de ce journal ne s'activent guère... Il faut dire que Nicolas Bouvier réquisitionne mon attention et les heures du soir, disons de la nuit, que j'ai l'habitude de consacrer à ce journal. Étonnant Bouvier. Après le voyage en Fiat Topolino de la Suisse au sud de l'Inde, le Japon maintenant. Dans "Chroniques japonaises" il nous fait en quelques pages une historique du Japon puis des rapports qu'il a entretenu avec l'occident du XVIème jusqu'à la deuxième guerre mondiale.... Pour nous faire réaliser combien nos peuples sont différents et combien ils ont vécu de siècles sans se connaître, ou sans se comprendre en tout cas... 

 

L'histoire mondiale est, de fait, si jeune... Aujourd'hui on serait tenté de penser que ces rapports ont toujours eu lieu. Le "made in Japan" nous fait penser à un voisin proche.

Le danger serait de penser aujourd'hui que les peuples se ressemblent puisqu'ils semblent si proches les uns des autres. Et pourtant... Il y a encore des abysses, des océans sans fin et des murailles infranchissables entre les hommes, même voisins... Et quoi qu'il paraisse, et bien qu'il semble que ce fut une évidence, le monde des humains est encore bien vaste et pas près de répondre à nos questions les plus élémentaires.

 

La semaine dernière Ludmila était ici et j'avais eu l'idée d'aller passer ensemble une nuit dans une chambre d'hôte que j'avais remarquée lors d'une précédente visite à  l'abbaye de Baume les Messieurs.

Je savais que le lieu lui plairait. D'abord puisqu'il se trouve dans une abbaye et d'autre part car les chambres sont absolument magnifiques et se rapprochent du rêve de vie de château que le communisme a laissé dans l'esprit des habitants de ses anciennes républiques (on rêve à ce qui est interdit).

 

Il s'avère en plus que le créateur de cette maison d'hôtes a décoré ses 4 chambres immenses avec beaucoup de goût. Les chambres comportent un mobilier recherché et sur murs et guéridons quelques oeuvres d'art bien au-dessus du standard désastreux que l'on trouve habituellement dans ces lieux. 

 

En plus, pendant le petit déjeuner,  j'apprenais que le propriétaire, Ghislain Broulard, est un ancien photographe ! Dans sa jeunesse parisienne il a travaillé dans la photo de mode et notamment pour Cardin. La salle de l'ancien restaurant, au premier étage, montre une grande quantité des clichés qu'il a réalisés dans les années 60/70, photos où les stars de l'époque nous rappellent, en comparaison des images qu'on a d'elles aujourd'hui, que le temps n'épargne personne... 

 

Après quelques années à courir les sujets d'actualité, lassé de vivre en ville, G. Broulard décide de s'installer à la campagne et en même temps abandonne la photographie, trop urbaine, pour devenir antiquaire. Le week-end il vend aux puces, la semaine il achète à la campagne. Une forme de compromis. Enfin, l'ancien play boy (il a maintenant 75 ans et on lui en donne 20 de moins) décide de monter un restaurant dans l'abbaye de Baume-les-messieurs. C'est probablement à son travail d'antiquaire qu'on doit la beauté et l'authenticité du mobilier.

 

Une image de notre lit :

 

 

et puis une autre photo, qui m'a fait penser à du Balthus, c'est un nu mais vous n'en ferez pas une jaunisse :

 

Les chambres sont chauffées au feu de bois, avec des poêles à foyer apparent. Ca vous met des idées de romances à l'esprit, et on n'y craint pas le froid.

 

Si vous ouvrez la fenêtre pendant la nuit, vous allez pouvoir découvrir la première cour de l'abbaye et, au fond, les parois rocheuses de ce qu'on appelle le cirque de Baume-les-Messieurs, un paysage caractéristique du Jura :

 

Si cela ne vous a pas donné envie, j'abandonne. En plus le prix est accessible : 70€ pour deux avec le petit déjeuner, ça vaut bien de manger des pâtes pendant une semaine !

 

A propos des différences entre les hommes, même de pays peu éloignés, cet endroit, pourtant si agréable nous a valu le lendemain un conflit haut en couleur. En effet, alors que nous visitions la dernière cour de l'abbaye, Ludmila se met à lire un petit écritoire. On y apprend que les chanoines avaient construits autour de cette cour des appartements individuels. Ludmila se met à s'exclamer sur la profonde spiritualité dans laquelle avait dû baigner ces chanoines. J'ai alors le malheur de dire que, plus que spirituels, ces chanoines devaient être de fins gestionnaires vu la quantité de terrains qui dépendaient de l'abbaye. Ma remarque lui fait l'effet d'une douche froide et la voilà qui se met à me comparer aux professeurs de marxisme scientifique qui l'avaient insupportée pendant toute sa scolarité ! Mais elle ne sait pas que, de mon côté, ce sont les moines en soutane qui ont insupporté ma jeunesse ? Et nous voici partis pour une folklorique engueulade où tout se mit à passer, le mysticisme et le matérialisme philosophique, la croyance en la réincarnation et la certitude de la finalité de la vie, l'idéalisme et le réalisme et toutes les déclinaisons de ces sujets contradictoires. Pendant une heure au moins nous avons piétiné dans la neige, argumentant à tue tête et réveillant tous les chats du quartier. Ludmila avec ses petites bottines avait les pieds trempés, les miens, bien que secs n'en étaient pas moins gelés.

 

On a dû terminer la scène, "your sicilian theater", comme dit Karel, par un sourire prudent puis un éclat de rire et on a couru dans la voiture nous réchauffer les pieds, chauffage et ventilateur poussés à fond. Ce n'était pas la guerre civile mais bon, deux histoires différentes sont de dangereuses sources de conflit, tant pour les peuples que pour les individus. Il faut apprendre à en maîtriser les effets négatifs et j'avoue que, même après plusieurs années de fréquentation, le danger est toujours présent et la prudence est de mise ! Pour cette fois on peut dire que le Jura, avec sa neige, ses bons petits plats et ses magnifiques paysages se sont occupés de faire oublier des différences fondamentales d'interprétation de la vie et de l'univers. Mais peut-être que cette remarque est-elle encore trop matérialiste?!... 

 

 

 

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Jeudi 12 mars 2009

 

 

Trop de travail pour me consacrer à mon journal ? Quelque chose comme ça. Ma tête passe d'une affaire à l'autre et il y en a beaucoup en ce moment !

 

Demain un premier concert avec une formation adaptée aux petits lieux. On y retrouve Titi et Guigui et on a accueilli un (presque) nouveau venu : Emmanuel Fornot. Nous avions déjà fait un concert ensemble, c'était au mois de juin. Un concert privé qui avait été très bien accueilli. On remet ça donc, avec un peu plus de travail et, néanmoins, un travail qui est encore en recherche. Manu vient de la funk, il a notamment participé à un groupe qui a très bien tourné dans les années 90 : Xiam. Et puis il s'est mis à voyager, la Réunion puis Madagascar où il a vécu de nombreuses années sur une petite île au nord du pays. Il y a eu une petite fille avec qui, tous les matins il allait se baigner, l'océan étant juste en face la "cabane" où ils habitaient. Depuis les évènements de Madagascar, la guerre civile étant imminente, il a décidé de réintégrer le pays. Sa jeune femme malgache et sa fille vont le rejoindre dans quelques semaines.

Je suis heureux de travailler avec Manu. C'est peut-être mon plus vieil ami à Besançon et c'est un merveilleux guitariste. Évidemment il faudra un temps pour que nos spécialités se fondent, car Manu est un guitariste avec un style très personnel et il lui faudra du temps pour se fondre dans ma musique. Mais c'est intéressant, on a déjà vu qu'on ne peut attendre que des bonnes surprises !

 

Côté film, je suis en train de terminer une suite de portraits de 7 minutes environ sur des personnes vivant à Besançon et originaires de l'immigration, - ou de la Migration ! J'ai beaucoup aimé travailler avec la famille Gaguenetti, je l'ai déjà écrit, j'ai aimé aussi travailler avec Rafika, une chanteuse de Besançon d'origine Chaoui. Ces films sont consultables sur le site "Migrations à Besançon" (aller dans la rubrique "Sites amis" pour avoir l'adresse). 

 

Cette série à peine terminée je dois commencer le montage d'un film sur un colloque : "Réussite scolaire et intégration sociale" organisé à Dijon au mois de décembre. Gros travail dont j'ai heureusement fait le plus pénible : le report sur papier de tout ce qui s'est dit, cinquante pages sur un cahier. Une épreuve !

 

La semaine prochaine sera riche en événements. Mercredi soir la projection de mon film "Migrants et Immigrés du Continent" dans le cadre de la semaine contre le racisme. Je l'ai revu hier soir et à la fin j'ai pleuré. Comment peut-on ne pas aimer ces gens ? En tout cas je suis heureux de pouvoir présenter ce film en public. Jusqu'à maintenant il vivait sur le net mais il n'y a pas d'échange, c'est un peu je viens me servir et je me sauve en courant...

 

Le lendemain de la projection je pars en Tchéquie et le soir j'accroche à Ceske Budejovice mon exposition photo : "Racontez-moi la Bohème". C'est le premier travail que j'ai fait en tchéquie. Ce qui a déclenché toute la suite!... L'alliance française a organisé cette exposition. Au début on voulait présenter mes photos sur la Bretagne ("Bien le bonjour de la Presqu'île") et la directrice de la culture à la Mairie a dit "on a déjà eu des expositions sur la Bretagne (Ceske Budejovice est jumelée à Lorient), ce n'est pas si courant un photographe français qui fait un travail sur la Bohème !" On frisait le chauvinisme mais bon, pas déçu de ressortir cette série.... Les photos de Bretagne n'étant pas encore tirées, en plus cela me fait beaucoup moins de travail ! Alors, vendredi 20 des classes viennent visiter l'exposition et je serai là pour les explications. Je me consolerai de la Bretagne en allant voir, en fin d'après midi, un très bon groupe Breton !

 

Un des motifs qui m'a aussi écarté de mon journal est la série télévisée réalisée par David Lynch : Twin Peaks. J'ai découvert cette petite merveille d'invention et de virtuosité. C'en était devenu une vraie drogue ! 26 épisodes téléchargés (qu'on me pardonne), j'en étais complètement accro ! Et cela jusqu'à ce qu'on découvre l'assassin de la belle Laura Palmer. A ce moment (vers le quinzième épisode) d'un seul coup ça devient ennuyeux. C'est là que j'ai pris conscience que ce n'était plus Lynch qui réalisait. Ca devient une série américaine sans intérêt. Quel dommage... 

Mais au début, à partir du pilote (Lynch avait prévu que, si la série n'était pas acceptée, il pourrait sortir le pilote comme un film à part entière), c'est de la grande envolée cinématographique. D'ailleurs je crois que c'est au cours de cette série que Lynch a forgé son nouveau style, que l'on retrouvera dans des films comme "Lost Highway" ou "Mulholand drive". 

 

A ce propos il m'est apparu que Lynch, qui est aussi musicien, peintre, photographe, a écrit ces films comme on écrit de la musique. Je ne vais pas faire un cours d'harmonie mais disons que, en musique, on utilise à la base une tonalité qui a ses accords de tension et de résolution. Et puis, en introduisant certaines notes, on arrive à sortir de cette tonalité de base pour entrer dans une nouvelle tonalité. De la même façon on peut revenir à la tonalité de base, et de la même façon on peut entrer dans des tonalités encore différentes. Il n'y a rien d'autre à justifier. Une note et hop ! on entre dans un autre monde. Eh bien David Lynch écrit ses scénarios comme cela. Il ne justifie pas. Il crée un événement de transfert, personnage, chose, décor, et on glisse dans un autre possible. Il se fout de la réalité, de la vraisemblance, il saute d'un monde à l'autre, utilisant la fascination que son univers suscite et se fout de toute vraisemblance, voire de toute logique. La seule logique c'est qu'il y a un élément d'un univers qui nous a permis de basculer dans un autre monde. Donc Lynch écrit ses scénario comme un compositeur de musique, - qu'il est du reste. Un grand maître du cinéma !

 

 

 

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Dimanche 15 mars 2009

 

Alain Bashung est mort. Il est mort hier après-midi. A 61 ans. Ce qui fait qu'il est mort une année plus jeune que Gainsbourg...

Vendredi soir nous avons fait un de nos plus déprimants concerts. J'avais ma tête des mauvais jours et Guigui et Titi avaient abusé les apéritifs. Pour la première fois je suis parti, je les ai laissés se débrouiller, après quelques comportements insupportables. C'était horrible et ce sera la dernière fois. Je ne peux plus continuer avec eux deux, il y a des combinaisons malheureuses, Titi+Guigui ce n'est pas possible. Ils s'influencent dans la mauvaise direction et me mettent trop en danger.

C'était glauque. Pourtant, à la fin, je suis revenu pour chanter "La nuit je mens". On le jouait, il y a six sept ans, avec Philépotes. J'ai eu envie soudainement de faire cette chanson. Titi m'a suivi à la basse. 

 

Et puis Alain Bashung est mort le lendemain. C'était donc une sale période, il devait y avoir un truc crade dans l'air, dans les astres, je ne sais où. On était tous à bout de forces, on a craqué, on s'est éteint.

 

Mais lui, Alain, c'est sa vie qui est partie, et son oeuvre s'est refermée sur lui.

Bashung c'était un très grand artiste. J'ai regardé tout à l'heure à la télévision un concert qu'il a donné au Bataclan en 2003. C'était sublime. Quelle musique, et lui, quelle classe et quelle précision ! Une profondeur, une richesse. Jamais il ne va vers la facilité, je veux dire vers la séduction facile. Gainsbourg y a cédé parfois.

 

Combien d'heures j'ai passé avec lui, avec notamment "Fantaisie Militaire", tous les grands moments d'émotion je lui ai demandé de les partager avec moi, "La nuit je mens", "Madame rêve" "sommes-nous?" "Osez Joséphine" qu'on écoutait avec Damien dans sa Dauphine.... Avant c'était Ferré que j'invitais dans les grands moments. Je ne sais pas, il y a chez eux quelque chose comme une sublime mélancolie, une saudade douce qui vous emporte et vous donne envie de pleurer de joie ou de tristesse, peu importe. C'est l'émotion qui compte. Des joies, des peines, des longues rêveries en voiture, sur l'autoroute menant vers la Tchéquie, le jour, le soir, la nuit...

La voix de Bashung, son phrasé nonchalant, sa gravité et en même temps cet amour du rythme, ces ruptures, ces audaces et la chaleur de ce timbre grave et tendre...

Combien d'heures de bonheur Monsieur Alain Bashung vous m'avez donné. Je vous connais et je vous ai fréquenté comme un ami et pourtant je ne vous ai jamais vu.... C'est fini, c'est perdu, je ne  vous aurai jamais vu. Et ce soir, en regardant ce sublime concert habillé de bleu, je dois dire que je le regrette. Ce n'est pas souvent que je regrette quelque chose, mais là... Je me consolerai donc en achetant le disque, j'espère qu'il vont l'éditer ce live, c'est tellement beau.

 

Alors adieu vieil ami qui ne me connaissait pas. Et merci pour les leçons que tu nous a données, pour les leçons que tu nous donnes encore. Je romps avec deux musiciens. Je penserai à toi quand il faudra choisir les remplaçants. Quand je commencerai à travailler avec eux. Il faut aller plus loin, le plus loin possible, dans l'imagination, dans l'audace, il faut rejeter l'évidence et ne pas craindre le non succès. Merci Alain Bashung, tu es un grand maître...

 

 

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Vendredi 20 mars 2009, Ceske Budejovice

 

Matin dans une chambre d'hôtel. Par la fenêtre ouverte sur la rue, je vois la neige tomber. Ici c'est encore l'hiver, je n'aurais pas du laisser ma veste de mouton à Besançon !

Je suis arrivé hier soir à Budejovice pour y accrocher mon exposition de photographies :"Laissez-vous conter la Bohème". Elle se trouve dans une très jolie salle du magnifique hôtel de Ville. L'exposition colle comme un gant au lieu et à la salle puisque, dans cette salle blanche aux plafonds voûté, on y voit des photos noir-et-blanc représentant des scènes de rues en Bohème Sud (dont Ceske Budejovice est la capitale). Je garde mon petit regret de ne pas y avoir vu naître mon expo sur la Bretagne, regret compensé par la masse de travail qui aurait été nécessaire et que je n'avais vraiment pas le temps de faire. Alors c'est très bien comme ça !

 

Dans quelques minutes je vais recevoir, dans la salle d'exposition, des groupes scolaires, à qui je vais devoir faire des explications, en Français. Cela dure jusqu'à 4 heures. J'ai beau essayé fuir l'école : l'école me rattrape !

 

La veille de mon départ, hier, nous présentions "Migrants et Immigrés du Continent". C'était la première projection en public du film. La projection a été organisée par deux jeunes femmes, Typhaine Blehin et Clémentine (?) dans le cadre de la journée contre le racisme montée par la Cimade. 70 personnes étaient présentes dont trois personnes ayant participé au film, Odile Chopard, la responsable du site internet "Migrations à Besançon" et qui a été, en quelque sorte, la co-productrice du film. Le débat qui a suivi la projection a duré je crois une heure et demie et il a fallu l'interrompre afin de respecter les horaires de fermeture de la faculté des lettres. J'ai d'ailleurs à cette occasion pu revoir l'amphi Donzelot où je suivais mes cours de Lettres Modernes il y a plus de vingt ans. Très émouvant ! Bref, je suis reconnaissant à Typhaine et Clémentine d'avoir organisé cette première projection du film. D'ailleurs, le film permet très efficacement de relever l'absurdité du gouvernement actuel en matière d'accueil (ou de non accueil) des migrants. Le film se concentre sur les migrants originaires du continent Européen, des migrants qui s'intégreraient sans difficulté pour peu qu'on les laisse travailler, des migrants qui sont en danger dans le pays qu'ils ont quitté et que notre gouvernement, rompant avec la tradition de terre d'accueil de notre pays, essaie de renvoyer chez eux, mettant parfois leur vie en danger.

 

Mais les lycéens tchèques vont m'attendre, il est temps d'aller les retrouver....

 

 

 

 

 

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Jeudi 26 mars 2009, Tabor, CZ 

 

 

Dernier jour en République Tchèque. Je dois avouer que je n'aime pas trop cette période ici. Le temps change sans arrêt, neige, grêle, pluie, éclaircies, grisaille, vent. J'ai eu l'imprudence de venir sans ma veste d'hiver et j'ai bien du mal à me réchauffer après l'imprudence d'un début de printemps à Besançon.

Heureusement je suis venu avec une bonne masse de travail : le montage d'un film sur un colloque filmé début décembre. Le film arrive à sa fin et je ne suis pas mécontent d'en venir à bout. Ces montages de colloques sont une épreuve. Il faut résumer des interventions d'une heure en une dizaine de minutes, sans pouvoir toucher bien sûr aucun des propos qui ne sont pas toujours très structurés. Mais enfin, à partir du moment où je me sens en accord avec les contenus, c'est juste l'appréhension du début, face à ces masses de phrases, qu'il faut réussir à maîtriser. Après le temps en fait son affaire !

Alors, tant (ou temps) qu'à faire, il vaut mieux avoir à faire ce travail ici qu'à Besançon où il y a toujours trop de choses à faire et à penser. La présence de Ludmila met bien sûr beaucoup de baume sur ces longues heures à couper des fragments innombrables de discours ! Comme elle a aussi beaucoup à faire, sans compter le temps qu'elle passe dans ses différentes salles de classes, du coup tout le monde est content ! Les repas et quelques échappées entre les draps sont un repos très appréciable, bref, c'est le grand luxe !

 

Quant à aller en promenade, le mauvais temps nous en épargne la tentation ! On verra ça cet été !

 

J'ai rencontré vendredi soir dernier, à Budejovice, après ma journée passée à recevoir des élèves dans la salle d'exposition, des musiciens bretons très sympathiques. Leur groupe à pour nom Arz Nevez et ils sont de différents coins de Bretagne, pas très loin des endroits que je fréquente l'été. J'ai assisté vendredi en fin d'après-midi à leur concert, excellent, et nous avons mangé ensemble le soir.

 

Ce qui m'a le plus surpris c'est le calme avec lequel ces gens entre 27 et 52 ans étaient capables de dîner ! Je ne croyais pas que c'était possible, vu les ambiances que j'ai pu connaître avec mon équipe précédente ! Cela me donne une grande envie de rencontrer de nouveaux musiciens, sans frénésie alcoolisée ou chanvrée. Je ne parle pas d'abstinence, mais seulement de mesure. Un peu de calme, d'écoute, de respect et de calme n'empêche pas l'humour et les éclats de rire. On peut bien rêver....

 

Je disais que j'étais en République tchèque. Mais je suis aussi un peu au Japon, avec Nicolas Bouvier dont la lecture de ses oeuvres complètes se poursuit. Depuis sa traversée du moyen orient et de l'Inde, le ton de ses récits de voyages ont un peu changé. La confrontation avec le peuple japonais a bien émoussé l'enthousiasme des premiers voyages. Je crois que tout voyageur sérieux va connaître la même évolution. Au début on se dit, comme l'écrivait Edgar Morin, "citoyen du monde". Et puis, plus on se confronte aux habitants d'autres nations, plus on se sent renvoyé à notre origine. L'autre nous renvoie à notre identité première car pour lui il est clair que vous ne lui ressemblez pas ! C'est donc une bien grande illusion que nous avons eue, "citoyen du monde" ! En plus, peu à peu on va découvrir que c'est aussi un excès. Derrière l'apparente ouverture se cache une projection un peu prétentieuse de ce que l'on est sur le restant de l'humanité. En fait c'est un droit que l'on s'est donné de s'approprier une telle universalité, un droit bien prétentieux et bien peu légitime. L'embarras de N. Bouvier face aux japonais en témoigne. Car ceux ci ne se gênent pas de lui prouver à chaque instant qu'il est un étranger chez eux et qu'ils n'ont pas besoin de lui !  Un fort sentiment de solitude s'ensuit, et on voit le voyageur s'enfoncer comme une ombre dans des paysages recouverts de brume où il se sent plus un intrus qu'un "citoyen d'ici" !

 

Comment accepter de n'être que ce que l'on ait, à savoir un citoyen français, lorsqu'il y a tant de Français à qui on ne voudrait pas ressembler !  C'est bien difficile... Trouver sa place, et sa juste place, et une place que l'on puisse accepter, dont on puisse se satisfaire, dans ce vaste monde....

 

Un trio de petites françaises viennent de s'installer à la table à côté de moi. C'est toujours un peu surprenant ! Que le monde ne soit plus un ensemble de parties étanches est déjà quelque chose de rassurant non ? Quant à des citoyens du monde, est-ce à souhaiter que tout le monde le devienne ? Cela voudrait dire que tout le monde se ressemble. Cela voudrait donc dire que la magnifique variété des hommes, des mentalités et des cultures aurait subitement régressée ? En fait rien de très souhaitable...

 

 

 

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Dimanche 19 avril 2009, Besançon. 

 

 

Silence ces derniers temps. Quelques soucis, bien entendu, ce n'est pas simple de remonter une équipe, et puis, des nouvelles chansons en gestation. Deux sont déjà terminées et une est encore à l'atelier... La première parle de Saturnia. Ceux qui ont lu les cahiers précédents s'en souviendront peut-être (c'est dans le sixième) : ce sont ces magnifiques thermes sauvages du sud de la Toscane. La seconde s'appelle "Les Cigognes d'Hel'pa". Si je peux dire que la musique du 'Singe Drako" est celle qui m'a demandé le plus de boulot, "Les Cigognes d'Hel'pa" est sans conteste le texte qui m'a demandé le plus grand travail.

 

Cette chanson est construite sur la base d'une chanson populaire du folklore slovaque : "To ta Hel'pa". Je connais cette chanson depuis plusieurs années et depuis longtemps j'attendais le moment d'écrire le texte français.

 

Il y avait plusieurs images dans la chanson originale qui m'intéressaient. Il y est question d'une fille qui dit qu'il pourrait y avoir 100 gars qui se présenteraient à elle, il n'y en a qu'un seul qui compte. Et pour lui elle serait prête à sauter le Danube. Le sujet est bien maigre. Pourtant il y avait cette idée de "sauter par dessus la rivière" qui m'intéressait. Au début Ludmila me disait que le jeune homme aimé habitait de l'autre côté de la rivière. J'aurais préféré mais bon, il est encore écrit "je sauterais par dessus le Danube pour lui". Et je voulais donc traiter d'un pont, qui saute par dessus la rivière, avec, de part et d'autre de la rive deux populations qui ne veulent pas passer sur l'autre rive. Et ce pont c'est celui de Mitrovica.

 

Je voulais attendre d'aller au Kosovo pour écrire la chanson. Et puis, voyant que le temps passait, j'ai décidé de remplacer mon voyage au Kosovo par une documentation sur internet. Je me suis donc mis à lire des pages et des pages sur Mitrovica. Et sur le Kosovo en général, et sur l'ancienne Yougoslavie encore plus largement. Et plus je lisais et plus je découvrais qu'il était impossible d'associer ces sujets, tellement graves et désespérants, à la comptine pleine de bonne humeur que connaissent tous les anciens Tchécoslovaques.

 

Il fallait donc chercher encore, jusqu'au moment de trouver le bon angle, le bon point de vue. Et puis en route j'ai trouvé la phrase

d'un journaliste qui disait : "Il n'y a que les pic verts qui peuvent vivre encore heureux à Mitrovica". Après le singe Drako, pourquoi pas un oiseau ? Mais quel oiseau ? Car le pic vert ne m'inspirait rien. Un oiseau migrateur : mots clés : oiseau migrateur Mitrovica, puis Kosovo. Et là j'ai vu surgir la Cigogne. Alors documentation sur les cigognes. Des pages et des pages encore. Et là j'ai trouvé mon sujet : les cas de conflits ethniques sur la voie de migration des cigognes d'Europe de l'Est (couloir différent des cigognes d'Europe de l'Ouest qui contournent la méditerranée par l'Espagne). 

 

Je pouvais donc introduire mon pont de Mitrovica, et je pouvais aussi intégrer la petite ville (village?) d'Hel'pa dans la partie française, cela deviendrait le point de départ des cigognes qu'on allait suivre jusqu'en Afrique du sud Ouest, la destination de leur migration d'hiver.

Je tenais mon point de vue, ce qui, finalement, est l'essentiel de toute oeuvre.

Après l'avoir lu à plusieurs amis, sans compter le public de la soirée Slam de mardi dernier, il semble que le texte soit très apprécié. On verra comment il passe en chanson....

 

Quant à la petite dernière en gestation, j'espère qu'elle finira par voir le jour elle-aussi dans l'enthousiasme ! Ce serait une chanson qui intégrera l'humour cette fois. Il est temps. Mais en même (temps), j'ai bien du mal en ce moment de trouver des sujets marrants. D'un côté il y a la gravité du monde et de l'autre côté il y a cette arrogante hilarité forcée que l'on commence à entendre partout sur les radios et les télévisions et qui ne me donne pas du tout envie de faire un humour qui de près ou de loin pourrait ressembler à ce qu'ils croient en être un.

Bien sûr cela complique les trucs. Me revoilà donc parti dans la doc. Cette fois non pour trouver un point de vue, que j'ai déjà, mais pour me documenter sur le sujet concerné, à savoir le blues.

On en reparlera donc plus tard....

 

 

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Lundi 27 avril 2009, Besançon

 

La Combette, Châtelblanc, près de Métabief, de Mouthe, ce matin vers 6 heures.

 

La Combette c'est la ferme de Jack, c'est son oeuvre de Facteur Cheval, c'est un peu sa vie, Jack, cette ferme dans les herbages qui font les meilleurs Comté, les meilleurs Comté qui font les meilleures fondues... Comme celle que Jack nous a préparée hier soir, un vrai régal !

 

Quel bienfait d'aller chez mon vieil ami, dans cette maison que je vois à chaque fois différente, car sans cesse Jack y améliore quelque chose de nouveau. La première fois il fallait pomper l'eau avec une pompe à main, à l'ancienne, puis il a installé l'eau courante, puis il a fait une véranda, puis il a refait pièce après pièce, s'est essayé au chauffage central, car pas facile à chauffer la grande maison sans le foin qui isolait les plafonds, sans la chaleur venant de l'écurie, sans tout ce qui fait la différence entre une ferme de paysans et une résidence secondaire (bien que principale en fait, officieusement). Petit à petit cependant le confort s'accroît. 

La première fois où j'y étais allé, c'était un fête avec plein de gens, de bière, de vin, de pizzas faites dans le four à pain, au centre de la maison. Et puis j'y suis retourné dans d'autres contextes, plus amicaux, plus tranquilles mais jamais ennuyeuses, car Jack est un bon vivant. Et c'est toujours un moment de paix, voire de poésie que ces quelques heures passées là-bas.

 

En ville il me semble que les Français sont tristes. Souvent. Et il m'arrive de sentir un poids, un ennui, une lassitude. Rares sont les nouvelles rencontres, on tourne en rond à Besançon...

 

On tourne en rond comme le fleuve autour de la ville. On tourne en rond dans l'espace, on tourne en rond dans son cerveau. On se mord la queue et on mord celui qui aura le malheur de passer par là quand on s'énerve après sa queue qu'on veut attraper absolument... Mais ce n'est pas toujours facile d'atteindre son but. Alors on s'énerve, on s'énerve et on en veut un peu à tout le monde, à tous ceux qui ne nous ressemblent pas tout à fait, à tous ceux qui ne nous intimident pas. Car on tourne en rond et on est peureux. Qui ne nous intimide pas (ne nous domine pas) et que nous ne comprenons pas vraiment, reçoit nos aboiements et nos morsures aux chevilles. Et ça ne nous rend pas plus heureux car nous sommes tristes et l'avenir, à raison, nous effraie...

 

Nous les Français, de Besançon, on n'est pas optimistes. On ressasse et on n'est pas très productifs. C'est normal, ce sont maintenant les Chinois qui produisent. Et on achète leurs produits car ils coûtent moins chers. Alors les Chinois ils ont plein de projets car ils voient l'avenir devant eux. Et nous les Français on est triste et déçu car avant on avait quand même l'impression, sans se l'avouer vraiment (ça se sent ces choses là mais ça ne s'avoue pas) qu'on était les maîtres du monde. C'est pour ça que maintenant les étrangers trouvent que nous sommes fiers. Fiers et suffisants. Les étrangers ils ne comprennent plus trop pourquoi on se sent aussi fiers, car ils sentent bien qu'on perd du terrain, - donc pas de quoi pavaner...

 

Quand ils voient notre Président les étrangers, ils se demandent pourquoi il s'agite comme ça, pourquoi il tape sur l'épaule des gens qui ne le connaissent pas bien, pourquoi il semble toujours vouloir que tout le monde fasse comme il dit, pourquoi il semble vouloir donner des conseils à tout le monde. Pourtant il n'est pas très grand, et son pays, pas trop non plus... 

 

Les Français ils sont plus naïfs que les étrangers. Eux ils y ont cru au cinéma du super Président petit. Ils n'ont pas compris qu'il allait leur enlever leur chemise et leur pantalon pour le donner aux riches. Car, comme tous les petits, notre Président avait besoin de se mettre du côté des grands... Les petits comme lui, il les méprise...

 

Et maintenant que les Français ont donné leur chemise et qu'on est en train de leur retirer leur pantalon, ils ont peur de l'avenir... Ils s'enferment dans leur maison et ils regardent la télévision car au moins c'est gratuit la télé. Toujours ça d'économisé. Et la télévision leur montre qu'il faut avoir plus peur encore car maintenant c'est la crise...

 

Alors les Français se méprisent et se disent que c'est mieux ailleurs, - ailleurs c'est bien sûr les pays plus grands que le leur. Ils se disent que les Américains sont mieux qu'eux parce que, eux, ils n'ont pas eu peur d'élire un grand Président noir. Les Français se rendent compte que tout ce qu'ils ont fait et d'élire un Président petit et blanc. Alors ils vont voir des films américains, au moins du grand spectacle, ils écoutent des musiques américaines, du grand art, lisent les grands romanciers, achètent des oeuvres des grands peintres américains.

 

Quand un de leurs grands artistes meurent ils disent : "Tiens, on ne parlait pas beaucoup de lui, je connaissais des chansons mais je ne savais pas que c'était de lui" ou alors ils disent : "C'était un grand auteur" même si ce n'était pas lui qui écrivait ses textes. On ne peut pas rattraper si vite tant d'années d'indifférence. Un artiste français, qui chante en Français, bof... Et c'est vrai que Bashung n'apparaissait pas dans "Voici Voilà, - Bravo !", ni même dans le canard déchaîné d'ailleurs.... Enfin, ce n'était pas un type qui faisait sensation, ni scandale... On avait presque oublié qu'il existait.... Jusqu'au jour où il est mort, alors là, quelle sensation !

 

Donc comme tous les Français, je tourne en rond. Comme tous les Français je manque un peu d'idées aussi, les grandes idées, celles qu'entretenait le parti communiste quand le parti communiste vivait de l'argent versé par la Russie soviétique, sur le compte du PNB pourtant pas très élevé de toutes ses Républiques. Et dans ces temps il y avait de l'argent, aussi, dans nos usines. Il fallait que l'usine produise, et si les ouvriers se mettaient en grève, il fallait bien que les patrons cèdent quelque chose. Maintenant les patrons ne sont plus dans leurs usines et ils s'en foutent de leurs ouvriers. Alors, si ça ne va pas comme ils l'entendent, ils ferment et délocalisent. Les ouvriers perdent alors confiance et, tant que l'usine n'annonce pas qu'elle va fermer, eux, ils préfèrent la fermer... Ils la ferment mais ils ne sont pas heureux, ils se sentent abusés, ils se sentent encore plus dépouillés que quand Monsieur Marx décidait de s'occuper de leur avenir...

 

Tout ça n'aide pas à leur remonter le moral aux Français. Les ouvriers, avant, ça faisait chier les commerçants, mais maintenant que les ouvriers font des économies, les commerçants pleurent les temps d'antan... C'est pas ça non plus qui vont les faire voter à gauche les commerçants... 

Et puis, en fait, comme la gauche n'a pas tellement d'idées non plus... Regardez les militants du PS, le peu d'idées qu'ils avaient ils se les sont fait piquer par Sarkozy ! Alors ils sont tellement moroses qu'ils n'arrêtent pas de s'engueuler et de se tirer dans les pattes. Ils feraient mieux de se taire cinq minutes et d'aller rechercher de nouvelles idées. Il y en a quelques unes chez les Besancenot. Ils pourraient faire comme Sarkozy a fait avec eux, leur en piquer quelques unes, ce serait de bonne guerre...

 

Mais bon, ce n'est pas facile de trouver des idées quand on a le bec dans l'eau... Et puis, les Besancenot ils disent qu'ils faut faire baisser la croissance, qu'il faut arrêter de consommer autant. Et nous les Français, on a quand même pris l'habitude de consommer...  Et puis, qu'est-ce qu'on ferait si on ne consommait pas ? On a pris goût à toutes ces choses futiles qui ne nous demandent aucun effort... Et comment montrer qu'on est plus riche que le voisin s'il n'y a plus rien à acheter ?

 

Oui, tourner en rond... Mais bon, un nouveau groupe à constituer, une nouvelle aventure à tenter... et bien sûr la peur, bien sûr le doute, le manque d'idées... Mais il y a encore des choses à raconter, essayer de rêver avec les gens, essayer de partager des errances, des voyages, des doutes et quelques pensées généreuses dont beaucoup se contrefoutent mais je me fous de ce qu'ils se contrefoutent et il vaut mieux quelques rares idées généreuses que des bols d'amertume et de haine du voisin !

 

La Combette, la maison et l'auto de Jack.

 

 

 

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Lundi 4 mai 2009, Tabor (CZ) 

 

Petite envolée en République Tchèque, très bénéfique pour prendre un peu de distance avec Besançon, et ses eaux stagnantes... Évidemment, l'idée d'eaux stagnantes est une affaire propre à chacun. Tout le problème est d'arriver à percevoir le moment où il est nécessaire d'aller s'oxygéner l'esprit afin d'éviter que quelques préoccupations deviennent des obsessions délétères. Si chacun prenait conscience de ce besoin d'aération, de renouvellement de ses images intérieures, on éviterait bien des débordements, des comportements et des mots regrettables... Mais chacun fait ce qu'il peut...

 

Donc nous avons profité que Ludmila avait quelques jours de congés pour aller faire un petit tour dans une région de la République tchèque que nous ignorions elle et moi. Je veux parler de ce que les tchèques appellent "Le paradis tchèque" "Ceske Raj", et qui se trouve à moins d'une heure au nord de Prague.

 

Le paradis tchèque a été classé réserve naturelle en 1955. En 2005, il a été classé géoparc européen et est entré dans le patrimoine mondial de L'UNESCO. La zone est comprise entre les villes de Turnov et de Jicin (prononcer yitchin). Et franchement, cela vaut le détour.

 

En fait tout est le résultat du travail de l'eau au temps du primaire où nos continents étaient encore sous l'océan. La roche sableuse, un peu similaire à notre grès des Vosges, sans la couleur rose caractéristique de la roche lorraine. L'eau a découpé ces rochers pour laisser des tours rocheuses hautes d'une cinquantaine de mètres et si nombreuses que les tchèques ont nommés ces attroupements des villes de rochers. On peut donc se promener le long des couloirs entre les roches, couloirs-labyrinthes où l'on monte, on descend, on monte et soudain on se retrouve au dessus des pitons de roches qu'on croyait seulement accessibles aux alpinistes. Le mélange roche et grands pins se fait à merveille, on marche sur un sable qu'on a l'habitude de fouler sur nos plages et les sites sont très bien entretenus, évitant que la végétation ne devienne trop envahissante et ne cache ces impressionnants reliefs.

 

 

Le seul bémol bien sûr est la fréquentation, on ne peut pas demander à de tels lieux de n'être visités que par quelques aventuriers ! Le lieu est connu autant par les tchèques que par les polonais dont la frontière est à une demie heure de là. Résultat, tout le contexte touristique d'usage, les familles de tous âges qui se croisent dans tous les sens, les enfants, les chiens... Mais le comportement des gens est tout à fait supportable, les Tchèques savent se tenir et respecter leurs voisins. On ne trouve pas un papier par terre et guère plus de mégots de cigarettes. Les lieux de boissons-souvenirs gardent un style d'architecture du début du siècle, maisons à colombages et à l'intérieur décoration folklorique, céramique peinte à l'ancienne, trophées de chasse, anciennes photographies des lieux, bois et cheminées.

 

 

 

 

 

Je parle là bien sûr des sites majeurs et on va dire exploités pour l'accueil des touristes (on paie 2 Euros pour visiter les sites, ici le site qui a pour nom : "Prachovske Skaly"). Mais, dès qu'on sort de ces endroits balisés aux parcours classés par difficulté, ce sont des petites routes vraiment charmantes, avec des vieilles maisons avec encorbellements, des sentiers partout où on peut aller se perdre, des percées sur des paysages grandioses, des petites grottes avec tout ce qu'il faut dessous pour allumer un feu de camp, et des fantaisies tordantes de pseudo Facteurs Cheval qui vous surprennent au milieu d'un village et des pensions, des auberges, des hôtels partout, aux prix très accessibles, - bref de quoi passer quelques jours de pur bonheur !

 

 

 

J'espère que cette petite présentation vous aura donné envie, après une journée à Prague (maintenant très chère), d'aller découvrir d'autres choses en République tchèque. Prague est saturée de touristes pas toujours tranquilles et très fatiguants. Donc, une petite virée au Paradis pourrait soulager à la fois le stress de la surpopulation et le porte monnaie ! Le mieux je crois est quand même d'y aller au printemps ou en automne, - en été je crains que la chaleur et la masse des touristes ne deviennent gênants.

 

 

 

 

 

 

 

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Samedi 23 mai 2009, Besançon 

 

 

Il y a quelques, - quelques c'est peu dire.... Il y a déjà un certain nombre d'années, un été, j'étais tombé amoureux d'une jeune femme blonde que je trouvais très belle. J'étais tombé fou amoureux. Fou, oui, totalement fou. Délirant tout  un été. Une folie pas trop grave quand même puisque l'amour quand il s'approche de la folie, le fait dans un tel état d'euphorie qu'il éloigne la douleur. Et sans douleur la folie est une maladie bénigne...

 

La jeune femme allait sur ses dix huit ans, j'en avais 26. Elle trouvait que j'étais un peu vieux pour elle, elle avait hésité, donné un peu, puis retiré.

 

Moi je la guettais tous les jours, espérant la croiser. Ce qui est arrivé quelques fois. Et la nuit, je vadrouillais dans les rues avec un petit cahier que j'emplissais de poèmes. Je me couchais très tard à cette époque, souvent à l'aube. Dans ces poèmes je l'appelais Cikuiku. J'avais trouvé ce nom dans un poème de Matthieu Messagier je crois, le fils du peintre.

C'est aussi à cette période que j'avais découvert le film de Jean-Jacques Beinex, "Diva".

Nous avons flirté un peu avec Cikuiku, mais un jour il y avait avec elle ses copines et j'ai eu l'impression que ses copines n'avaient pas plaidé en ma faveur.

Et puis, au mois d'août, elle est partie comme animatrice de colonie de vacances. Alors j'ai terminé mon petit recueil de poèmes. Je n'avais plus l'inspiration puisqu'elle n'était plus là et que je ne pouvais plus espérer la croiser le lendemain.

Elle est revenue, mais revenue elle était devenue fuyante. Je voulais l'inviter à boire un verre sur une terrasse, c'était encore la saison. Mais elle s'esquivait.

Un jour que je la croisais encore, que j'essayais encore de l'inviter autour d'un verre pour parler, elle m'a demandé : "Mais qu'est-ce que tu veux?" J'aurais pu lui répondre "Je veux t'aimer, je veux que tu m'aimes, je t'aime comme c'est difficile à imaginer, je pense à toi jour et nuit" Mais au lieu de ça j'ai répondu "rien". Et je suis parti.

 

Je suis parti en direction de la porte noire. J'étais désespéré. Je me suis dit que j'allais me suicider, que j'allais monter à la Citadelle et me jeter depuis la tour de la Reine. Au moins, avant de mourir je volerais un peu.

A la place Victor Hugo j'ai obliqué vers le square Castan. J'avais écrit sur le square Castan dans le recueil de poèmes. Puis je me suis retrouvé dans la rue des Granges et je n'étais plus si sûr de vouloir mourir.

Arrivé à la rue Bersot je me suis dit que je ne mourrais pas. Je suis allé m'asseoir à une terrasse. Dans le film "Diva" de Jean-Jacques Beinex, lors du premier rendez-vous du jeune facteur et de la chanteuse, il y avait dans le bar un vendeur de bijoux ambulant, un Africain. Il offre un bracelet à la chanteuse et au jeune facteur il lui offre un oiseau de verre, un oiseau magique lui dit-il. Je me souvenais parfaitement de cette scène.

Sur la terrasse où j'étais assis passe un vendeur de bijoux, noir lui aussi. Je lui demande s'il a des gri gri porte-bonheur, un oiseau par exemple, mais il n'en avait pas. Alors j'ai eu l'idée de lui acheter une bague de corail. L'anneau c'est un lien mais c'est aussi une frontière entre une zone et une autre. J'ai acheté l'anneau et l'ai mis à mon doigt.

Cet instant a été très important.

L'anneau, vraiment magique.

 

J'ai tapé mon recueil de poèmes, j'ai fait une reliure, tout à la main. Quatre exemplaires. Un jour j'ai recroisé Cikuiku et je lui ai offert le recueil. Il s'appelait "Chapelet de stances à Cikuiku"

Et le temps a passé.

Deux ans après je l'ai recroisée. Et cette fois elle s'est mise à me parler tout à fait différemment qu'auparavant. De lettres écrites en conversations sur une table de café, et de milles choses très étranges et compliquées, nous sommes devenus amants et je l'ai énormément aimée. Mais jamais nous ne nous sommes jamais installés ensemble. Nous avons été amants des années, des amants secrets et c'était merveilleux. Il n'y a jamais eu de rupture. Cikuiku s'est envolé peut-on dire...

 

Ca c'était le premier miracle de l'anneau.

 

Le second c'est que je me suis inspiré de cet été d'amour fou pour écrire mon premier film. J'ai toujours associé Cikuiku à un oiseau, rapport à sa personnalité et rapport aussi à l'oiseau magique de "Diva" de Jean-Jacques Beinex.

J'ai réussi à monter le financement de ce film. C'est à ce jour mon seul film de cinéma. Le reste c'est de la vidéo. Dans le film, à la fin, un vendeur noir offre un papillon au jeune homme qui vient de passer une nuit magique, sur les traces d'une jeune femme qu'il ne trouvera pas. Mais il voit tellement de choses dans cette nuit qu'il semble vraiment avoir été guidé par une magicienne. Le film s'appelle "Nuit d'un sacre" et on en trouve une très mauvaise copie sur le site.

 

Je ne sais quel écrivain avait écrit "l'amour est la porte de la transcendance" C'était bien l'idée dominante de ce magnifique été d'amour fou et l'idée dominante du film.

 

Or voici que ce soir, 23 ans après ces événements, je regarde à nouveau le film de Jean-Jacques Beinex et je me rends compte d'une chose hallucinante que je n'avais même pas remarquée à l'époque !

 

Après avoir fini le film, en 1992,  il y a eu des articles dans la presse locale et j'ai même été invité à une émission de France 3 à Dijon. C'était pendant les rencontres de Beaune et donc je m'étais retrouvé invité en même temps qu'un réalisateur de film. Et le réalisateur qui avait été invité c'était ... JEAN-JACQUES BEINEX !

Il a regardé, en direct, un extrait du film. Or j'ai découvert plus tard, fait étrange, que la scène que France 3 avait choisi de présenter, faisait penser à une scène du film qu'il avait tourné avec  Montand, et qui n'était pas encore sorti à l'époque ! On voit dans nos deux films une jeune femme qui sort nue de l'eau, un lac chez Beinex, une rivière chez moi, et cela dans une ambiance fantastique. Il a donné son avis sur cet extrait, très favorable. Et quand je l'ai remercié, à la fin de l'émission, il m'a dit "Ne me remerciez pas, c'est ce que j'ai senti. Dans votre film on sent la poigne d'un metteur en scène"

 

Évidemment cela m'a fait très plaisir. Mais tout s'est arrêté là. Tout s'est arrêté là car j'avais même oublié que c'était son film "Diva" qui, par biographie interposée avait inspiré l'idée principale de mon film ! Comme je l'avais totalement oublié je n'ai même pas pensé à lui en parler ! C'était quand même une incroyable coïncidence que ce soit justement avec lui que j'aie été invité ! Et l'idée de cette incroyable coïncidence ne m'est même pas venue à l'esprit à ce moment là ! C'est dingue d'être passé à côté d'une prise de conscience pareille ! C'est seulement ce soir, en regardant "Diva" à nouveau que je prends conscience de cette coïncidence, en revoyant cet oiseau de verre offert par le vendeur noir !

 

Peut-être qu'il est mieux de faire durer ces émerveillements. Peut-être qu'à l'époque je n'en avais pas besoin. Mais ce soir j'ai trouvé cela fascinant ! 

Fascinant et aussi un peu décevant. Car en fait la vie de ce film qui m'a coûté tant d'efforts, de problèmes, de conflits a eu une vie si courte... Quand il y a magie, il y a généralement aussi le succès avec. Là il n'y a pas eu de succès, et puis Beinex est parti vite fait et il n'y a pas eu d'autres contacts que ces quelques mots relatés ci-dessus...

 

Alors, de si longues années après, découvrir cette incroyable coïncidence, et s'en émerveiller, c'est une petite compensation pas désagréable.

C'est comme ça la vie. On y cherche en permanence la magie, l'exceptionnel, et quelques fois, ding! voici qu'elle nous fait cadeau d'un coup de baguette magique ! Et des fois on peut même passer à côté d'un coup de baguette magique sans s'en apercevoir ! 

C'est ce que dit Manu Chao dans une de ses chansons à propos des fleurs dans nos jardins "Y'en avais une, je l'ai pas vue, j'ai marché dessus"

 

En tout cas j'aime toujours autant "Diva" et... mon Dieu comme le timbre de voix de la chanteuse est proche de celui de Ludmila !

 

 

 

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Vendredi 26 juin 2009 

 

Raréfaction de ces pages... Plus d'un mois sans une ligne... Il est parfois nécessaire de revenir sur soi, de faire silence...

Que s'est-il donc passé pendant ce mois ? Il faudrait dire "ces mois" car la précédente page était circonstancielle.

 

 Il y a eu déjà beaucoup de travail concernant la musique. Travail solitaire, quatre nouvelles chansons à apprendre (dont une en Slovaque !), travail collectif, un répertoire entier à monter avec une nouvelle équipe. Et puis les concerts sont venus, fruit du travail de tous. Chacun a dû y mettre du sien, séances à deux, trois, ou tout le groupe. Cinq. Le temps d'essayer, de chercher, d'explorer d'autres choses. Et je suis très heureux du résultat. C'est incontestablement un nouveau chapitre qui s'ouvre et le public s'en est bien rendu compte. "Magique" a été qualifié notre premier concert au Groony's. Un public hyper attentif et enthousiaste. Ce qui a été considéré par l'équipe comme de bonne augure. D'autres dates pointent leur nez, d'autres projets, c'est palpitant !

 

Après cela, ailleurs, dans le monde, il y a eu le mouvement de révolte en Iran. Ce peuple passionnant qui a voulu faire entendre sa voix. J'ai beaucoup aimé tous les Iraniens que j'ai croisés. Souvent des gens brillants et sensibles. Il y avait eu "Metropolis" pour commencer à remettre les pendules à l'heure, il y aura maintenant ce mouvement populaire. Continuez peuple iranien, de vous faire entendre, et courage pour l'avenir !

 

Il y a aussi, dans un autre registre, la mort, hier, de Michael Jackson. Quoi en dire sinon que beaucoup vont se sentir vieillir... J'avais regretté la disparition de Marvin Gaye, celle de M. J. me laisse froid. Je n'avais aucune histoire commune avec cet homme. Mais on dira que son succès ne lui a pas apporté le bonheur. Comme quoi vendre 500 millions d'albums n'est pas un but heureux dans une vie. En plus, en se blanchissant, il a en quelque sorte tourné le dos à lui-même et aux siens. Ce qui risque bien de ternir éternellement son image. Quand on pense qu'aujourd'hui le Président des États-Unis est plus sombre de peau que lui, tout son entêtement à changer de visage paraît un peu ridicule. Sinistre destin...

 

Voilà, cette page sera courte. Cela changera....

 

 

 

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Lundi 3 août 2009, St Pierre Quiberon  

 

Retour en pays celtique (j'ai lu quelques chroniques locales disant que les celtes n'étaient jamais venus ici, mais bon...).  Moi qui ai l'habitude de dire qu'il ne fait jamais mauvais en Bretagne, je dois avouer que cette fois le beau temps n'est pas vraiment au rendez-vous. Mais, me disait un voisin de cendrier (face à un bar), en Bretagne, même quand il fait mauvais, il y a toujours la mer à regarder et c'est toujours beau. Ce qui m'inciterait à persister à dire qu'il fait toujours beau en Bretagne. Après tout on n'est pas obligé de préciser si on parle du temps ou du paysage !

 

Cet après-midi, promenade à la Trinité sur Mer, où résident, en cette saison, Le Pen et Souchon (pour équilibrer l'impression). J'avais pour guide une autre résidente (en fait, ses parents), Murielle, amie et trésorière de Productions du Capricorne. Elle m'a fait découvrir le chemin des douaniers, un très joli sentier qui borde le littoral des plages du nord au port. Je n'avais vu de la Trinité que sa partie la plus pimpante, le pont, le port de plaisance et le centre ville, - pas trop mon style. Mais ces quartiers du littoral, petites ruelles, maisons XIXème début vingtième et ce charmant sentier valent le détour. 

 

En somme, un petit univers paisible, bien Breton.

 

Puis la pluie a commencé à tomber et ce fut la précipitation :

 

Nous sommes rentrés sous la pluie et les bouchons car, les soirs de pluie, on se demande pourquoi, tout le monde rentre à Quiberon!...

 

Arrivés au camping, Théo me plante pour rejoindre ses potes. Comme lundi le chanteur est en congés, il décide de céder à un délicieux moules frites dans le petit port de Portivy. J'adore cet endroit, pour moi le plus romantique du coin...

 

 

 

 

 

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Mardi 8 septembre 2009, Besançon.  

 

Il faut ralentir la rédaction de cet improbable journal pour que quelques lecteurs se manifestent : mais pourquoi si peu de pages ? - Ah ?? Vous lisez ??

 

C'est très curieux cette publication. En en parlant, certaines personnes vous rient au nez, surtout les femmes d'ailleurs, c'est étrange. Les femmes n'ont-elles pas le même rapport au privé que nous autres hommes ? Et puis, aussi, il y avait eu l'incident avec mes anciens musiciens. Lors de ce concert de mars, catastrophique, j'avais écrit une page. Or il s'avère que ce concert a presque coïncidé avec la mort de Bashung (à un jour près). Dans la même page je parlais de la façon dont s'était passé ce concert et je parlais aussi de la mort de Bashung. Résultat, certainement plus de gens que d'habitude sont venus lire cette page. Et parmi ces personnes, les musiciens concernés évidemment. Lesquels m'ont accusé de leur avoir fait du tord...

 

Je prenais donc conscience du problème de responsabilité de ce journal. N'ai-je donc pas le droit de parler de certaines choses ? En l'occurrence des problèmes d'alcoolisme de mes collaborateurs ? Puis ce fut au tour d'ami(e)s de ces musiciens de me faire part de ce problème de responsabilité. J'ai donc décidé de changer le texte et d'enlever les éléments compromettants. Du coup un trouble a suivi.  Légitime, non légitime ce journal ? D'autant qu'il est lu au même titre par des gens bienveillants que par des malveillants. Donc, à ce moment de crise, le groupe par exemple était à reconstruire totalement, j'ai choisi de me retirer de cet espace public, de plonger sous terre et de me retrouver dans une intimité paisible et distante.

 

Depuis, une nouvelle formation a été constituée, de nouvelles chansons écrites. 

Mais fi du positivisme ambiant. Les doutes restent les mêmes, les incertitudes, les questionnements...

 

Plus les jours avancent et plus il me semble difficile d'exercer une activité artistique sérieuse.

Les disques ne se vendent plus. Les disques c'était la durée. J'ai croisé des gens qui m'ont dit : "Mais j'écoute ton CD "Frontières" tous les jours !" Cela paraît incroyable, mais pourquoi le diraient-ils s'il n'y avait pas un peu de vrai ? Croyez vous que cet homme aurait fait de même s'il avait mis ces quelques morceaux dans une play-list de 2000 titres ?

 

Donc les gens n'achèteront plus de CD, et ce lien intime entre un objet physique, lien presque fétichisant, en tout cas pleinement approprié par celui qui l'a fait entrer dans son habitacle, disparaîtra. Le marchand de produits culturels aura à mettre en avant des artistes qui devront s'enflammer immédiatement quitte à ce qu'on jette les cendres après l'incendie pour laisser place à une nouvelle mise à feu. Artistes jetables, recherchés de plus en plus jeunes, le public jeune étant le plus explosif, et prêts à figurer dans les shows télévisés pour un public boulimique, peu gastronome et à la mémoire courte.

 

Et puis, parallèlement, le public des festivals. Le culte de la scène, cérémonies profanes de la catarsis organisée, avec néanmoins ses règles d'or : culte de la modernité et de décompression immédiate des contraintes sociales. Quand on risque de se faire arrêter dans les rues parce qu'on s'est assis pour boire un litre de bière, même chose pour un gramme de shit découvert dans une poche, la contrainte est lourde ! Or, dans le festival tout est permis, les flics restent à la porte. La musique doit répondre à ce défouloir, il faut de l'énergie, il faut qu'on puisse se tortiller, hurler, se rentrer les uns dans les autres, - bref il faut bien calmer cette tension que nos sociétés imposent au quotidien, de plus en plus, et de plus en plus anonymement : depuis bien longtemps, Foucault l'avait annoncé, le pouvoir s'est dissous, ce qui ne veut pas dire que l'étau s'est desserré.

 

Combien d'artistes vénérés par le passé n'auraient plus le droit de cité s'ils démarraient aujourd'hui ? Ces Léo Ferré qui se sont enfoncés dans nos esprits à l'aide de vinyls usés par le passage de multiples diamants, ou par les soi-disant inusables CD qui ont fini, eux-aussi, par s'user à force de les prendre et de les ranger ?

Alors quoi faire ? Quel posture prendre, quels choix ? 

 

Il me semble qu'il y a deux directions possibles. On en revient à Nietzsche et sa distinction entre Appolinisme et Dyonisisme. 

L'un, solaire, intègre les règles d'une société et surfe dessus, un art de surface, un art du consentement. On fait ce qui marche. 

 

L'autre vise une autre recherche, plonger dans l'humain, y exhumer les pulsions inconscientes et sur cette base, faire exploser les tensions en les déminant de l'intérieur. 

Nos sociétés dominantes transgressent en permanence des règles de respect humain pour alimenter et faire perdurer ses systèmes. Les crimes et les délits s'opèrent dans l'ombre, une ombre dissimulée derrière le vernis des démonstrations triomphantes. La société de consommation se couvre d'images favorables à son système, et les pays dominants se protègent derrière des frontières qui deviennent peu à peu des gouffres entre des mondes élus et des mondes victimes. 

La mondialisation des marchés, au lieu de monter l'ensemble des pays du globe vers une croissance équilibrée, fige, par des actions occultes, la capacité des pays pauvres à aller vers un mieux être équitable. 

Au niveau des écosystèmes, la pollution émise par les pays les plus riches se répercute sur le climat des pays les moins riches, terrible injustice. Les populations victimes, qui naturellement tentent de migrer vers les pays non sinistrés, se retrouvent bloquées par des frontières de plus en plus surveillées, de plus en plus étanches, et finissent enfermées dans des camps de transit et s'y installent, ne pouvant ni continuer leur migration ni retourner dans leur pays d'origine. 

Ces grandes tendances ne vont que s'accroissant et peu de gens s'en étonnent ou s'en insurgent. On fait mine de ne pas être au courant, comme au temps du Nazisme où l'on disait ne pas savoir, ou ne pas croire que de telles horreurs étaient possibles.

Je veux dire par ces exemples qu'il y a une voie possible. Une voie que rien n'autorise sinon la nécessité d'assumer ses responsabilités. 

 

Dénouer les nœuds individuels, dénouer les nœuds sociétaux ou sociaux (pour parler mieux français mais être moins précis.) Tel pourrait être une volonté artistique légitime, ce qui ne veut pas dire qu'elle est praticable. Mais peut importe, citer Bashung ?

 

"À l'avenir
"Laisse venir
"Laisse venir
"L'imprudence

 

Pourtant, vouloir dénouer le nœuds n'est pas encore faire oeuvre. Il y a le texte. Bon, le lien est assez direct. Mais la musique est une autre paire de manche. Là il faut inventer une forme, une forme qui soit elle aussi dionysiaque... C'est là le point délicat, c'est encore là que je butte, que je cherche...

 

Et le temps passe inexorablement, - le temps sera-t-il suffisant ?

 

Réponse de Bashung encore :

 

"Tu perds ton temps
"À te percer à jour
"Devant l'obstacle
"Tu verras
"On se révèle

"Tel Perceval
"Tel Casanova
"Tel Harvey Keitel

"À l'avenir
"Laisse venir
"Laisse le vent du soir décider
 

 

 

 

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Mardi 22 septembre 2009, Ceske Budejovice (CZ) 

 

 

Budejovice où j'ai accompagné Ludmila pour ses cours au conservatoire.

C'était apparemment aujourd'hui la journée européenne du déplacement ou quelque chose comme cela (c'était écrit en tchèque...). Sur la place de la vieille ville, des animations autour des transports, et, garés sur la place, deux vieux autobus magnifiquement restaurés, un tramway et un diesel. Je me suis amusé à prendre quelques clichés de ces mastodontes dont la vue me fait immédiatement penser à la Tchécoslovaquie, ce lointain pays du temps de la guerre froide :

 

 

Mais ce n'est pas à propos de cette journée du transport que j'avais décidé d'écrire une page de ce journal, mais pour faire part d'une autre journée sur laquelle Ludmila travaillait depuis plusieurs mois : les journées Novak de Kamenice nad Lipou.

 

Vitezslav Novak est un compositeur tchèque du début XXème. Si l'on connaît Janacek, on connaît beaucoup moins, et presque pas du tout en France, cet élève de Dvorak.

Ludmila lui a consacré sa thèse de troisième cycle qui avait été dirigée par Milos Schnierer, un musicologue réputé qui enseigne depuis très longtemps à l'académie de musique de Brno.

 

Schnierer a consacré une partie de sa vie à étudier Novak et à essayer de le faire connaître. Il a fondé l'association internationale Vitezslav Novak qui a travaillé sur la classification et l'étude du fond laissé par le compositeur. Ludmila a beaucoup participé à ces recherches et Schnierer l'a chargée d'organiser ces rencontres dans la ville natale du compositeur.

 

Une des grandes responsabilités de Ludmila pour ces rencontres a été l'organisation d'une exposition sur le compositeur qui devait avoir lieu dans le château de Kamenice. Et je dois dire qu'elle a monté une exposition pleine de vie et d'intérêt, même pour le non tchécophone que je suis.

 

En voici quelques photos :

 

     

 

Ces journées ont aussi été l'occasion de conférences et de 3 concerts qui ont permis de découvrir un ensemble d'œuvres allant des premières compositions encore tentées de romantisme aux dernières oeuvres à l'harmonie plus complexe et polyphonique. L'invité d'honneur pour ces concerts était le pianiste Radoslav Kvapil, virtuose de renommée internationale qui s'est consacré toute sa vie à l'interprétation et à l'enregistrement de la musique tchèque, - des compositeurs français aussi. Il a notamment enregistré toute l'œuvre pour piano de Dvorak. 

 

Photographies de Radoslav Kvapil et de Jill, son épouse d'origine française, avec qui j'ai eu de longues conversations, heureux l'un et l'autre de pouvoir parler un peu, ne comprenant le tchèque ni l'un ni l'autre. Dans la vitrine, une photographie de Marie, la femme de Novak :

 

 

Une spécificité de ces concerts a été que toutes les pièces pour piano ont été interprétés sur le piano ayant appartenu à Novak. Et je me suis demandé, lorsque Radoslav Kvapil, ou lorsque tel ou tel autre jeune pianiste de l'académie de Brno, le travaillaient au corps, si le vieil instrument pouvait se souvenir des moments où le compositeur lui pianotait les premières mesures de ces mêmes morceaux.... C'est beaucoup demander à un instrument d'avoir une quelconque mémoire, mais quand même, le fait de savoir que ces pièces ont été composées sur cet instrument, conduit l'imagination à toutes sortes de divagations.

 

 

 

Ludmila, en alternance avec les pièces de Radoslav Kvapil faisait lecture de poèmes de Jarmila Hanzalkova, amie et inspiratrice de Novak. On aurait pu penser que Novak et Jarmila furent amants mais Ludmila m'a affirmé que non. Désolé de vous décevoir...

 

Nous pourrions parler un peu de cette petite ville, Kamenice nad Lipou, où a vécu le compositeur. Lipa étant en tchèque "le tilleul", arbre national de la République tchèque. La traduction du nom de la ville serait quelque chose comme "rocher au-dessus du tilleul". Un tilleul aurait donc donné son nom à une ville ? Oui, tout à fait ! Eh ce tilleul se trouve encore dans la cour du château ! Ce qui en fait le plus vieux tilleul de République tchèque ! 

Malheureusement, depuis 1248, date de sa mise en terre, il a pris un coup de vieux... On a dû lui couper son tronc principal, celui qui s'élevait vers le ciel et, pour soutenir ses multiples bras tout aussi multiplement centenaires, il a fallu créer tout un ensemble de cannes afin d'éviter qu'il ne croule sous son grand âge. Le résultat est assez curieux : un tilleul qui ressemble à un dragon aux milles pattes ! En voici un aperçu. J'ai ajouté un cliché de l'entrée du château où figure, bien sûr, un buste de Novak !

 

 

 

Mais qui donc a été ce Vitezslav Novak ? 

Né en 1870, fils du médecin de Kamenice, ce qui ne l'empêchera pas de se trouver très jeune orphelin de son père, il est un jeune pianiste qui aimerait étudier la musique. Mais sa mère préfère qu'il étudie quelque chose de plus sérieux. Ce sera donc le droit. Le jeune Vitezslav s'y résout mais décide parallèlement de s'inscrire au Conservatoire qui était, à l'époque, une école supérieure. 

 

Le voici donc à Prague. Mais le droit, Vitzslav n'en veut vraiment pas, il abandonne et se consacre exclusivement à la musique, suivant les classes de piano et de composition. Rapidement repéré pour son talent par Dvorak, il va en devenir l'élève en même temps que Suk et Nedbal (pour les connaisseurs, Suk sera ensuite le professeur de Martinu ).

 

En 1896, Novak découvre, lors de séjours en Moravie et en Slovaquie, la musique folklorique de ces pays, une musique très vivante dont la richesse l'enthousiasme. Il va donc traîner dans les tavernes et y transcrit sur papier toute la musique qu'il entend. Par la suite il intégrera ce folklore dans des compositions "savantes". 

 

La fin du XIXème siècle connaît d'ailleurs une grande vague de nationalisme : les peuples dominés par les grandes puissances de l'époque : l'empire austro-hongrois, la Russie, la Pologne, veulent retrouver leur identité culturelle mise à l'écart d'une façon parfois très musclée par l'occupant.

Cet intérêt pour le folklore va donner à Novak les bases de son succès. Devenu professeur de composition au Conservatoire de Prague en 1910, il va attirer un grand nombre d'étudiants en quête d'identité nationale : Tchèques, Slovaques mais aussi Yougoslaves et Ukrainiens. Il voyage beaucoup, visite des expositions de peintures de toute l'Europe, découvre les impressionnistes français (Ravel, Debussy) et apprend plusieurs langues qu'il parlera parfaitement : le Français, l'Allemand, le Russe, l'Italien et l'Anglais.

 

C'est une période de grand succès, il est à l'époque plus connu que le fougueux Janacek. Il écrit un nombre considérable d'œuvres pour piano, de lead, de musiques de chambre. Mais il est moins doué pour la musique scénique : l'opéra, la musique pour ballets ne sont pas ses  tasses de thé. A la mort de sa femme, en outre, son écriture s'assombrit, donnant lieu à des oeuvres complexes et graves.

 

Novak meurt en 1949. Un an après l'accession des communistes au pouvoir. Dans la lignée de Dvorak, Novak partage avec son maître une tendance mystique qui ne va pas être du goût des communistes et notamment du nouveau ministre de la culture Zdenek Nejedly. Celui-ci en outre, étant jeune, avait voulu épouser la fille de Dvorak qui n'en avait pas voulu et préféra épouser Suk : il en tint rancune à celui qui ne sera jamais son beau père et à ses disciples. Bref, Dvorak et à plus forte raison ses élèves vont être mis sur la touche, on ne les étudie plus, on ne les interprète plus, on fait en sorte qu'on les oublie. Les oeuvres de Novak et ses camarades seront maintenues dans des tiroirs clos et gare à qui voudra tenter de les en faire sortir.

 

Le tumultueux Milos Schierer va être de ces musicologues à vouloir sortir Novak de l'oubli. Inquiété pendant la période communiste il écrit des livres qui resteront inédits jusqu'à la révolution de velours en 1989. La fin du communisme va lui permettre de sortir ses manuscrits, de les faire publier. En 1997 sa "Novak society", crée en 1980 devient "l'international Novak society" dont le but sera d'inventorier l'œuvre de Novak, de la faire étudier par ses élèves et de la faire interpréter. 

 

D'ailleurs ces journées Novak, à Kamenice, ont permis de lancer les premiers dés d'un projet auquel participeront la Ville de Kamenice, Milos Schnierer et son international Novak society ainsi que Radoslav Kvapil soutenu par la fondation Dvorak dont il est le Président. Il s'agira d'un concours international de piano reposant sur l'œuvre de Novak.

 

Si je me suis tant étendu sur cette biographie, c'est que j'ai saisi, à l'occasion de ces rencontres, l'importance d'amateurs, de chercheurs et d'interprètes dans l'avenir de l'œuvre d'un compositeur. Qu'est-ce qui fera qu'un compositeur sera retenu par la postérité ou non est bien sûr un grand mystère. Pourquoi en France nous connaissons Janacek et pourquoi nous ne connaissons ni Novak, ni Nedbal ni Suk ? C'est un ensemble d'éléments humains, politiques, esthétiques, une histoire d'air du temps. 

 

Et je fus assez impressionné de voir ces hommes, avec parfois des airs de comploteurs, essayer de trouver des solutions pour rendre à ce compositeur mort depuis soixante ans les palmes que l'histoire lui a retiré.

 

Ah ! j'oubliais un de ces comploteurs ! Il s'agit du petit fils de Novak, Joseph Follpracht, un financier suisse qui a décidé de mettre à profit les bénéfices tiré du grand capital en devenant le mécène des projets menés autour de son grand père. Et puis il y a eu aussi le Maire de Kamenice qui a opté pour la culture pour mettre en valeur sa petite ville et y attirer les visiteurs. 

 

Mais je ne suis pas ni journaliste, ni musicologue, et je terminerai par féliciter ma petite amie qui a organisé l'essentiel de ces rencontres, qui en a établi le programme, rédigé un livre pour l'exposition d'une cinquantaine de pages et qui a eu la bonne idée de m'introduire dans ce milieu si particulier de ces passionnés de musique du passé.

 

Le soir du troisième jour, nous sommes rentrés à Tabor avec Joseph Follpracht qui devait prendre un avion pour Zurich le lendemain. Il nous a offert un repas dans le restaurant des anciennes thermes de Tabor, aujourd'hui fermées, - un charmant restaurant au bord de la rivière Luznice. Il me semblait être revenu dans un monde normal d'humour et d'amicale bonne humeur car, si les musicologues tchèques font un travail important de mémoire, j'avoue que parfois il m'ont donné l'impression de manquer un peu de décontraction et d'ouverture d'esprit. Un monde d'hommes au sérieux crispé et inquiet, accompagnés d'épouses réduites au rôle de figuration... Peut-être simplement de très vieux messieurs anxieux de poser les dernières pierres sur la grève de l'existence, avant que le futur ne vienne effacer les traces d'une vie de travail acharné...

 

 

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Jeudi 8 octobre 2009, Besançon 

 

Me voici à la veille d'un nouveau départ en République Tchèque. Cette fois ce sera un peu différent puisque je vais participer à un festival vidéo. Quatre films au programme : "Jara Novotny ou 30 ans de la vie d'un photographe tchèque", "Nuit d'un Sacre", l'après-midi, et "PB. TRISTAN, en route vers la Bohème" et "Elle s'est battu" dans la soirée.

 

Ce festival m'a donné l'énergie de reconstituer des films qui se trouvaient dans des états on va dire "délabrés", suite à des pertes d'originaux ou à des déficiences de DVD. J'ai donc passé plus d'une semaine de recherche et de rénovation, sans compter le sous-titrage de deux films, "Nuit d'un Sacre" et "PB. TRISTAN en route vers..."

 

Cela n'a pas été sans mal, d'autant que le matériel profite toujours du moment où on a besoin de le faire travailler d'une façon soutenue pour se mettre en panne. Mais enfin je suis très heureux du résultat. Et notamment par rapport à "Nuit d'un Sacre", qui m'avait coûté trois années de travail, et qui, peut-être par le jeu du passage du PAL au SECAM, avait perdu ses couleurs.

J'ai donc dû réaliser un nouveau télécinéma. Mais la qualité de cette copie (l'original est du film-pellicule 16mm) s'est trouvée être d'une qualité épouvantable : image pas nette, son où on entendait plus la machinerie du projecteur que celui du film, changement incessants de balance des blancs, sans compter des coupures qui m'inquiètent beaucoup (ont-ils cassés le film ou ont-ils seulement fait un mauvais montage ?), coupure du son en fin de générique etc. Une catastrophe ! Mais comme j'avais une copie d'après Betacam qui avait une belle image noir et blanc (majorité du film), que j'avais une cassette VHS qui avait un son correct, j'ai pu utiliser de cette mauvaise copie que les quelques fragments en couleur. En faisant un film de trois cassettes, j'ai réussi à avoir quelque chose de convenable. On peut aller le voir dans la page du site consacrée à ce film. Il est à noter que l'encodage de Dailymotion (qualité "creative content") est une vraie merveille ! Compliments à ce site !

 

"PB. TRISTAN, en route vers la Bohème" a subi un autre travail. Tout d'abord j'ai revu le montage pour raccourcir le film et retirer des blablas qui en plus n'étaient plus opportuns vu ce qui s'est passé avec mon ancienne équipe. Le film est devenu plus musical et on y dit que l'essentiel. Le festival a payé la traduction des dialogues en Tchèque et le film est maintenant en deux versions, française et tchèque.

 

Enfin, la rénovation du clip que j'avais réalisé avec deux jeunes des Clairs-Soleils, Yassine et Ichem, a été de l'ordre du miracle. J'en avais gardé une copie en "avi non compressé" sur un DVD. Or le DVD avait une erreur. J'ai passé deux longues soirées à essayer de récupérer des données. La première sans succès. C'était rageant : je voyais chaque image du film sur "Première" mais je n'arrivais pas à lancer le film. La seconde soirée je me suis aperçu que c'était un problème de disque dur et j'ai recommencé. Et là, peu à peu, j'ai réussi à récupérer toutes les données qui n'étaient pas altérées sur le DVD. Restait un "trou" de données qui représentait environ 10 secondes de film. J'ai donc comblé ce "trou" en utilisant une copie VHS qui me restait. Vu la durée et le rythme soutenu du film, on ne se rend presque pas compte du changement de qualité. Dès que Dailymotion aura validé ce nouveau "creative content" (ils vérifient que c'est bien un film de création et que vous avez les droits sur sa diffusion) on pourra le voir en haute définition sur la page consacrée à de film.

 

Quant à la musique, la création n'est pas en reste de ce côté. Il est même en train de se passer quelque chose d'important qu'on peut vraiment considérer comme un tournant. D'abord les musiciens interprètent ce répertoire avec une grande sensibilité. Jeff met beaucoup de couleurs à l'aide de ses deux synthétiseurs, Stéphane a des très bonnes idées et sa contrebasse fait des miracles, Jean-Pierre à la guitare joue de sa virtuosité et de tous ses effets avec un goût et une pertinence remarquables et enfin Patrick s'éclate à jouer de la batterie comme un instrumentiste et non pas seulement comme un accompagnateur. Les nouvelles chansons ("Saturnia", "L'homme qui fuit, "les Cigognes d'Helpa") leurs demandent des efforts d' imagination dont ils se tirent fort bien, et je me régale d'avance du travail qu'on va mener sur "Madame Grunenwald", "Ne les approchez pas" et "Une nuit que nous aimons", trois chansons encore sous forme de maquette d'arrangement et qu'on va bientôt jouer ensemble en répétition.

 

Nous allons intégrer un séquenceur pour certaines de ces chansons. Cette touche électro m'enchante littéralement ! Je recherchais ça depuis si longtemps ! On va enfin partir pour des univers étourdissant, il faut que ces concerts deviennent un voyage ! En route Messieurs Dames !

 

Je crois que le nouveau PB. TRISTAN ne ressemblera plus du tout à l'ancien. Même ma voix a changé ! Au final une couleur plus rock, voir électro, moins de notes classiques mais plus d'effets sonores. C'est vraiment magique ce qui se passe en ce moment !

 

On va attendre un peu avant de se produire. Tout se passe pour l'instant dans le laboratoire.... Le diable y court sans aucun doute !

 

J'en profite pour vous montrer quelques photographies des musiciens. Je les avais prises fin juillet lors de notre premier concert avec Stéphane :

 

Là c'est Jeff !

 

 

Jean-Pierre,

 

Patrick,

 

Le beau Stéphane et ....

 

Non, ce n'est pas un musicien ! C'est l'incroyable patron de l'Estaminet à Vagney (88). Chapeau bas, - un artiste !

 

 

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Mercredi 10 octobre 2009, Tabor (CZ)  

 

En arrivant en République tchèque, petit changement d'habitude, je suis allé en direction de Hluboka, laissant à Pisek la direction de Tabor. En effet, Ludmila terminait trois journées de réunions et de conférences, en lien avec le nouveau département de la faculté où elle a été intégrée. Il s'agit d'un département très particulier, un peu expérimental, dirigée par une femme très charismatique, et qui ouvre un département de musicothérapie. Ces trois journées étaient le premier volet d'une série de stages soutenus par différentes structures universitaires internationales. Ce stage s'adresse à des enseignants qui ont, à un moment ou un autre de leur vie, connus des pathologies liées à leur travail. Dépressions, troubles somatiques, dérèglements hormonaux. Pendant plusieurs années, ce panel d'enseignants va être suivi par une équipe médicale et vont en même temps recevoir des soins, des activités thérapeutiques et des enseignements philosophiques qui devront les conduire à un mieux vivre. 

En même temps, le stage est un observatoire devant permettre de comprendre ce qui a conduit ces professeurs vers leur pathologie. Bref, une initiative que je trouve très intéressante et j'ai retrouvé ma petite amie pleine d'enthousiasme ! Pendant ces trois jours, outre les conférences entendues, les sujets qu'elle avait présentés, elle avait donné, le deuxième jour, un concert avec Karel qui avait reçu un vif succès. Elle était donc ravie !

 

Après un dîner bien mérité (910km au compteur !) Ludmila me dit : "Viens, je vais te montrer quelque chose de magnifique !"

Il faut quand même préciser que Hluboka est un bourg situé à une dizaine de kilomètres de Ceske Budejovice (Budvar) et qu'il possède un des plus curieux châteaux de Bohème !

 

Nous voici donc partis sur un petit chemin, couvert d'une tonnelle, en direction des jardins du château. Le temps commençait à fraîchir, mais il faisait encore bon, rien à voir avec les premières neiges qui viendront dans quelques jours ! 

 

Après quelques pas dans la pénombre, nous voici dans le parc face aux premiers murs du château :

 

 

Toujours difficile de photographier ces éclairages publics, aucun préréglages de balance des blancs ne convient. Et si l'on fait la balance des blancs, on perd tout l'effet coloré de ces lumières nocturnes, cela donne cela :

 

 

C'est quand même pas mal. Mais Ludmila me dit : "attends, ce n'est pas cela, tu vas voir, quelque chose d'absolument vibornié (magnifique) !"

 

La brume plane sur les jardins face au château. Une petite fontaine, une bonne odeur de pelouse et de forêt portée par la brume. Et voici que nous arrivons devant une façade art nouveau absolument splendide : "Ce n'est pas une des merveilles du monde ?" Me demande mon amie, toujours fière de son petit pays. En tout cas, certainement l'intention des bâtisseurs était d'y faire songer !

 

 

Dommage que la lumière flurorescente brûle le roses des fleurs sur le balcon, mais je vous garantis qu'en vrai, c'est sublime. Le travail de ferronnerie est une pure dentelle et l'ensemble de la galerie, un rêve d'architecte !

 

 

 

Ne demandez pas à un spécialiste d'architecture de vous décrire ce style, c'est un mélange fantaisiste et un peu mégalomane, de néo tout ce que vous voulez. Le château date du début 20ème, les princes tchèques avaient envie d'épater je ne sais qui, mais j'ai bien l'impression que ce château a dû sérieusement creuser les caisses publiques ! 

Mais enfin, aujourd'hui, le touriste ne regrette pas le déplacement et comme moi, est content de ne pas avoir oublié son appareil photo ! Un gros gâteau qui de jour comme de nuit répond à tous les vœux romantiques : nous étions ravis ! 

 

 

 

Après avoir contourné le bâtiment, nous nous sommes trouvés devant l'entrée principale où nous n'avons pas résisté de nous tailler le portrait devant ce capricorne en bronze qui trône à l'entrée du château : Productions du Capricorne garanti !

 

 

 

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Lundi 26 octobre 2009, Besançon 

 

Je viens de regarder Princesse Mononoke de Hayao Miyazaki. Et puis je pense soudain à cet homme à la tête d'un studio considérable (Ghibli), une sorte d'artiste homme d'affaires. Et j'imagine cet homme travaillant à l'écriture de ces scénarios à la poésie puissante, mettant de côté le stress de la direction de son équipe et plongeant dans son imagination pour aller y puiser à la fois la détermination et l'innocence de ses jeunes héros, l'entêtement, le désespoir ou la clairvoyance de ces dieux de la nature, la vision de décors remarquables d'invention, la sensibilité de ses sujets, et cette fraîcheur d'une pensée préoccupée par les temps modernes et essayant de l'introduire dans une métaphore aux vertus pédagogiques et humanisante. C'est tout à fait impressionnant. Quelle force étrange a-t-on donné à ce créateur pour qu'il réussisse cette parfaite fusion entre l'adulte entrepreneur et l'enfant rêveur et quelque peu utopique ! 

Et je suis certain que ses films aident davantage à la naissance d'une sensibilité écologique que mille militants du parti des verts ! Et je dis cela sans aucune animosité envers ces militants, ne remettant pas en cause la légitimité de leur combat.

 

Il en est de même de ce magnifique film d'Arthus Bertrand, "Home", qui est lui aussi une pure merveille. Les préoccupations sont je crois similaires, les moyens évidemment différents. Mais ils ont un pouvoir égal à une prise de conscience. 

 

Que vont faire les Hommes, je veux dire ceux d'en bas et ceux d'en haut de l'échelle sociale ? Vont-ils réussir à réguler la machine infernale qu'ils ont mis en branle ou bien seront-ce les intérêts des uns et des autres, les petits intérêts, qui auront raison du devenir des autres ? 

 

En tout cas l'homme n'a pas fini son travail d'invasion délétère de l'espace, et je crois que l'homme n'a pas fini son travail immonde de prédation envers la terre qui l'accueille depuis quelques petits millénaires, envers les espèces qui y vivent et envers sa propre espèce.

 

Faut-il aimer l'homme pour s'inquiéter de son avenir!... Car après tout, si la vie a réussi a donner sa forme à cette planète, ce n'est pas l'homme qui l'empêchera de reprendre le travail commencé depuis des milliards d'années. Qui est en danger en fait ? Les espèces qui disparaissent, oui certes, mais c'est surtout l'homme qui est le premier exposé au danger, celui d'aujourd'hui et ceux de demain.

 

Nos enfants et leurs descendants... 

En 2050 Théo, mon fils, aura 58 ans. Deux milliards de personnes auront dû fuir, pour survivre, l'endroit où ils sont nés. Où vont-ils aller ? Comment va-t-on réussir à intégrer ces populations ? Les villes ne cessent de grandir. Comment vont s'équilibrer ces mégapoles, et que vont-elles devenir si une crise ou une autre réduit à la misère une grosse partie de la population ?

 

Et lorsque le pétrole va venir à manquer, comment va-t-on réussir à nourrir cette population qui n'arrête pas de s'accroître puisqu'on sait qu'aujourd'hui le pétrole est à la base de l'énergie et de la gestion même de l'agriculture ?

 

La démocratie résistera-t-elle à ces diverses pressions ? D'autant plus que tout, aujourd'hui dans l'économie, pousse à changer l'entreprise et ses actionnaires en sorte de grandes familles néo féodales et une partie de la population à s'enfoncer dans la précarité...

 

Notre civilisation, si elle s'enfonce dans l'égoïsme de ses privilèges actuels, va-t-elle résister à la rancœur de tous ceux qui n'en profitent pas ? Je comprends les intégristes qui, pleins de haine, rêvent de réduire en miette les pays dorés qui les pillent depuis des décennies !

 

Vraiment l'homme est un drôle d'animal. Partagé entre ses pulsions de grand mammifère prédateur et son magnifique cerveau pouvant concevoir le pire comme le meilleur. L'un et l'autre pourraient pourtant faire bon ménage. Les peuples indigènes nous en donnent la preuve. On pourrait presque parler à leur égard de peuples heureux ou, en tout cas, de peuples équilibrés. 

 

Mais depuis qu'ils ont appris à utiliser toutes les énergies mise à disposition, une petite partie des humains a développé une délirante croissance et les nuisances qui l'accompagnent se sont mises à progresser à un rythme infernal. Sans limitation tout s'emballe. Le problème est de savoir si l'Homme réussira à s'imposer lui-même des limites ou bien si ces limites seront imposées par des facteurs extérieurs. Mais dans ce cas ce pourrait être très violent. Et qui dit "violent" dit destruction dit mort dit souffrance...

 

Qui donc subirait ces destructions ? Peut-être nos enfants, nos petits enfants....

 

J'entendais un ami me dire à propos d'Arthus Bertrand : "J'en ai marre de ces gens qui nous fabriquent des scénarios catastrophe !" Oui, bien sûr, c'est ce que se sont dit beaucoup de juifs pendant la seconde guerre mondiale : "non, ce n'est pas possible, ils exagèrent", c'est aussi ce que ce sont dit ceux que ça arrangeait de penser qu'un holocauste ne puisse pas exister. Le résultat a montré combien l'erreur d'appréciation a coûté de vies !

 

En tout cas, pour revenir à Miyasaki et Arthus Bertrand, je considère qu'ils sont dans le juste, qu'ils sachent en outre monter leurs projets colossaux pour sensibiliser un très large public aux eujeux d'aujourd'hui et demain, je ne pense pas qu'on puisse leur faire aucun reproche. Des artistes et des chefs d'entreprise (aussi....) qui assument leurs responsabilités de portes paroles, c'est en tout point honorable !

 

C'est aussi comme cela que j'entends mener mes projets et ma création, à mon humble niveau. J'ai décidé de traiter des thématiques se préoccupant de notre avenir dans mes chansons : la légitimation et l'accueil des migrants, la protection des peuples indigènes autonomes, le devoir de distance (à l'opposé des mouvements de masse qui cherchent toujours une rancœur à assouvir et des sorcières à brûler - on la voit aujourd'hui à l'action avec cette pression collective qui veut que Polansky soit livré à ses juges en quête de gloire). La difficulté est de ne pas sombrer dans un discours facile et populiste. Rechercher l'universel sans être populiste (= hurler avec les loups, spéculer avec l'air du temps, flatter les idées convenues), - le dosage est délicat.

 

 

 

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Vendredi 11 décembre 2009 

 

Il faut regarder les pages écrites (et non écrites) du néo-journal pour mesurer la vitesse du temps qui passe ! Ciel ! La dernière fois c'était en octobre !

Il faut dire que pendant ces presque deux mois il y a eu une sorte de plongée dans un monde qualifié par Ludmila d'"Obsessionnel", - celui de l'écriture de nouvelles chansons...

En fait l'article précédent était en quelque sorte la porte d'entrée dans ce grand souterrain dans lequel il y a un ordinateur, une guitare, un clavier et un microphone. Et puis, j'oublie ! - des tas de textes cherchés sur la toile, lus, des vidéo aussi, regardées, des sons écoutés eux-aussi sur le net... Un travail nouveau, très absorbant...

 

Mes amis musiciens ont été mis à contribution. Stéphane s'est placé en conseiller, celui qui corrige quelques problèmes de rythmique, qui pose un effet ici, enregistre un motif de guitare et remplace bien entendu par sa contrebasse électrique la fausse basse midi que j'avais d'abord écrite. Et puis Jean-Pierre est passé placer un chorus de guitare par ci, un accompagnement par là. De son côté, Patrick est venu enregistrer un roulement de balai sur sa caisse claire, ou un rythme à l'œuf, une forme de marimba. Et enfin Jeff qui reprenait au propre mes lignes de clavier enregistrés en midi avec son doigté plus assuré que le mien.

 

Des chansons sont nées : "Ne les approchez pas" qui parle des tribus indigènes menacées par nos invasions, "La grande transhumance", reprise d'un concept de Paul Virilio et qui parle du milliard de migrants prévus pour 2050, "La nuit", "Madame Grunenwald" ode à l'esprit de distance (un des préceptes des philosophes hédonistes, - comme des libertaires d'ailleurs). Il y a eu aussi des nouveaux arrangements de "Nedo et Sanela" une chanson déjà ancienne, et des "Cigognes d'Helpa", qui, elle, n'a que quelques mois.

En résumé les chansons qui constitueront le prochain CD. La musique a changé, la voix aussi, l'esprit... enfin, presque tout...

C'est un nouveau travail qui passe par des heures d'écoutes de bandes de son afin de trouver des ambiances adaptées au morceau, des couleurs musicales nouvelles. Des samples ont été empruntés à des chansons anciennes, traditionnelles. Une petite fille et un joueur de guimbarde Jivaro, une démonstration vocale (et quelle voix !) de Yma Sumac, des extraits d'un film documentaire, des choses comme ça...

 

Les retours des quelques auditeurs sont plutôt bons. Quelques uns trouvent certaines chansons sombres - mais pourquoi pas ? Disent-ils après... Beaucoup quand même sont surpris. Ils ne s'attendaient pas à ça. Jeff  m'a même dit qu'il était un peu dérouté... 

La gageure n'est pas moindre. Mais Nicolas Bouvier ne disait-il pas que "prendre des risques rend la vie plus longue ?"

 

On avance quand même sans se faire trop d'illusions. De toute façon la chanson  est dans une heure sombre, il ne faut plus trop rêver gagner de l'argent, - surtout que je pense que ces chansons rendront le meilleur d'elles-mêmes dans le CD où elles vont être pressées. Des musiques qui demandent plusieurs écoutes et qui distilleront un étrange et envoûtant parfum... 

Mais le CD est mourant disent les professionnels.... Mince, ça tombe mal !

 

Tant pis, cela ne m'empêchera pas de fabriquer mon jardin magique. Un jardin pour les rêveurs, pour des rêveurs qui se soucieraient du monde dans lequel ils vivent, qui s'intéresseraient à leurs semblables, - rien à voir avec des blasés cyniques... Mais vous pensez qu'il y en a encore beaucoup de ces rêveurs là ? Hein ? Allez, répondez !

 

Enfin voilà, c'était juste un petit lever de tête, et je replonge dans l'atelier des fantaisies. Le temps va se remettre à passer encore... 

La gestation n'est pas finie : grand afflux d'hormones, esprit refermé sur son ventre, communication restreinte....

 

 

 

 

 

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